Le 29 avril 1945, La Manche Libre consacre son éditorial au « scandale des mines » : « Quatre écoliers, quatre enfants dont le plus vieux avait onze ans sont morts hier, victimes de l’explosion d’une mine antichars, à Rémilly-sur-Lozon. Un village de chez nous prend à nouveau le deuil. A notre douleur se mêle une indignation légitime. Un an après la Libération, des engins de morts, abandonnés par l’ennemi, continuent à faire des victimes. Il ne se passe pas de semaine sans que s’allonge la liste » de nos martyrs. Il y a des champs et des prairies de chez nous où l’on n’ose plus s’aventurer. Nous dénonçons la carence des autorités compétentes. Il faut que le scandale des mines cesse. Pourquoi n’emploie-t-on pas les moyens de défenses dont on dispose maintenant pour le déminage à protéger nos populations ? Pourquoi ne pas utiliser les prisonniers allemands à nous débarrasser de ce qui a été leur œuvre ? ».
… Impuissant à arbitrer utilement les oppositions d’hommes et de doctrines, de Gaulle est parti, ne voulant pas que son nom sombrât dans des conflits d’assemblée ; et surtout dressé par la ferveur populaire au-dessus des partis, de Gaulle s’est refusé à redescendre dans l’arène où l’homme n’est plus que partisan » Ouest-France 28 01 1946…
… En Basse-Normandie, si le soulagement prévaut à l’heure de l’armistice et si une poignée seulement des habitants rejoint le général de Gaulle au premier appel, l’indignation grandit peu après et se transforme en hostilité envers les Allemands et Vichy…
On peut refuser de s'adapter, on peut s'accrocher à ce qui était hier et dont on a pris l'habitude.
Et, comme les faits ne répondent naturellement pas à cet immobilisme, on peut s'en prendre au gouvernement et juger que c'est sa faute si les choses ne sont pas ce qu'on voudrait qu'elles soient ou bien exiger de lui qu'il empêche par une intervention permanente et artificielle ce que l'évolution commande cependant de faire... Eh bien ! Quels que puissent être les regrets et les protestations, quelques que puissent être les difficultés, la France d'aujourd'hui entend au contraire, épouser son époque.
Charles de Gaulle
… Dans ses « Mémoires de guerre », Charles de Gaulle évoque cette visite à Cherbourg : « Une grande vague d’enthousiasme et d’émotion populaire me saisit quand j’entrai à Cherbourg ».
Enervées par la prolifération des V, les autorités d'occupation interviennent pour les faire enlever et lancent des avertissements à la population. A Valognes, "où des grands V portant en leurs branches la croix de Lorraine ornèrent les murs, les Allemands entrèrent en furie. Ils lancèrent des équipes qui lavèrent et qui grattèrent les emblèmes séditieux. Mais la peinture était de bonne qualité ; les pierres rugueuses, patinées par les ans, la buvaient avec délice et les traces s'obstinaient.
Prière à de Gaulle
Notre de Gaulle qui êtes au feu,
Que votre nom soit sanctifié,
Que votre règne arrive,
Que votre volonté soit faite sur la terre comme dans les airs,
Donnez-leur chaque jour leur bain quotidien,
Et rendez-leur au centuple les offenses qu'ils ont faites aux Français,
Ne nous laissez pas sous leur domination,
Et délivrez nous des boches.
Ainsi soit-il !
75 ans après la libération du département de la Manche, malgré les nombreux ouvrages et articles publiés sur l'histoire de ce département pendant les années 1939-1945, plus particulièrement sur l'été 1944, on peut soutenir que beaucoup reste à écrire en privilégiant les diverses sources contemporaines des événements continuant de s'ouvrir, en s'entourant des précautions d'usage à l'égard des témoignages à distance recomposés au fil du temps et au gré des circonstances, en s'émancipant des pressions médiatiques, des propagandes politiques, voire des décisions de justice dans la mesure où Thémis n'est pas Clio. On peut néanmoins prouver qu'il est possible d'aborder les sujets tabous et de souligner l'exceptionnalité manchoise de certains faits caractéristiques de ces années sombres d'un passé encore présent.
Le gaullisme crée une belle discontinuité historique dans cette région à dominante rurale, agricole, catholique, conservatrice et de droite, qui n'est séduite ni par le prestige du Maréchal, ni par le "retour à la terre", ni par la devise "Travail, Famille, Patrie".
Le 3 juillet 1944, c’est-à-dire trois jours plus tard que prévu en raison du mauvais temps, les Américains, disposant avec le Cotentin d’une solide base arrière, tentent de rompre la ligne de défense allemande entre Portbail et Carentan. Mais, pour libérer le Coutançais et le Saint-Lois, ils doivent franchir une zone marécageuse de 10 à 15 kilomètres de profondeur entre Carentan et Gorges, ainsi qu’une ceinture de collines autour de la Haye-du-Puits et Saint-Lô.
Ces lieux stratégiques étant bien tenus par les Allemands passés maîtres dans l’art du camouflage, les Américains doivent imaginer une méthode pour gagner la guerre des haies.