Citation de babel95
Un monde se ferme, un monde s'ouvre
Le professeur a demandé aux élèves d'écrire sur un événement de leur vie, ils sont libres de choisir leur sujet. Dorian a envie de parler de la mort de son chat, Ana décide d'écrire sur le mariage de son oncle, Gaspard sur son vol en montgolfière, Binh hésite. "Ne vous inquiétez pas, les rassure le professeur, je vous rendrai vos copies sans les lire à personne".
Alors, pour la toute première fois, Binh raconte la grande maison où elle vivait avec ses parents et ses 8 frères et soeurs, elle raconte qu'une nuit ils ont fui sous les balles en laissant tout derrière eux, même son doudou qu'elle n'a pas eu le temps d'attraper ; qu'ils ont habité dans une tente, derrière des grillages, il y avait des tentes serrées les unes contre les autres, elle passait des heures à faire la queue pour la nourriture et puis un jour, son papa a disparu. 4 ans après, elle a fait un grand voyage avec sa maman, ses frères et soeurs, et elle est arrivée ici, elle avait froid parce que dans son pays il fait toujours chaud.
Binh donne les feuilles au professeur sans relire, tant pis pour les fautes d'orthographe.
Binh aime beaucoup ce professeur qui leur fait découvrir le plaisir de lire, qui a toujours du temps pour les aider après les cours, qui l'a aidée avec les règles de grammaire et de conjugaisons auxquelles elle ne comprenait rien du tout lorsqu'elle est arrivée ici. Alors elle est contente de lui raconter son histoire. Une histoire qu'elle gardait secrète. A la maison, personne n'en parle, jamais.
Le professeur a créé une confiance, un espace de sécurité pour Binh et ses secrets : la confiance aide à construire un monde qui s'ouvre.
Le soir, quand le professeur a terminé de lire l'histoire de Binh, il se dit qu'il faut absolument partager ce récit avec la classe.
Le professeur veut bien faire : il souhaite que ses élèves découvrent les drames causés par les guerres et les dictatures, autrement que dans les livres d'histoire ou à la télévision.
Quand Binh entend les premiers mots de son récit lus par le professeur devant toute la classe, elle se recroqueville sur sa chaise. Elle voudrait disparaître, devenir transparente. Elle ne voulait pas que ses amis sachent, elle ne veut pas être la réfugiée, l'étrangère, la rescapée. Ils vont dire qu'elle fait son intéressante, qu'elle est la chouchoute du prof, ou encore pire, ils vont avoir pitié d'elle. Plus rien ne sera comme avant.
20 ans plus tard, Binh se souvient encore de ce professeur qui a voulu bien faire, mais qui l'a trahie en livrant son intimité à toute la classe. Elle se souvient que, ce jour-là, elle a décidé de ne plus faire confiance, à personne : la trahison dresse des barrières, le monde se ferme.
Le professeur a demandé aux élèves d'écrire sur un événement de leur vie, ils sont libres de choisir leur sujet. Dorian a envie de parler de la mort de son chat, Ana décide d'écrire sur le mariage de son oncle, Gaspard sur son vol en montgolfière, Binh hésite. "Ne vous inquiétez pas, les rassure le professeur, je vous rendrai vos copies sans les lire à personne".
Alors, pour la toute première fois, Binh raconte la grande maison où elle vivait avec ses parents et ses 8 frères et soeurs, elle raconte qu'une nuit ils ont fui sous les balles en laissant tout derrière eux, même son doudou qu'elle n'a pas eu le temps d'attraper ; qu'ils ont habité dans une tente, derrière des grillages, il y avait des tentes serrées les unes contre les autres, elle passait des heures à faire la queue pour la nourriture et puis un jour, son papa a disparu. 4 ans après, elle a fait un grand voyage avec sa maman, ses frères et soeurs, et elle est arrivée ici, elle avait froid parce que dans son pays il fait toujours chaud.
Binh donne les feuilles au professeur sans relire, tant pis pour les fautes d'orthographe.
Binh aime beaucoup ce professeur qui leur fait découvrir le plaisir de lire, qui a toujours du temps pour les aider après les cours, qui l'a aidée avec les règles de grammaire et de conjugaisons auxquelles elle ne comprenait rien du tout lorsqu'elle est arrivée ici. Alors elle est contente de lui raconter son histoire. Une histoire qu'elle gardait secrète. A la maison, personne n'en parle, jamais.
Le professeur a créé une confiance, un espace de sécurité pour Binh et ses secrets : la confiance aide à construire un monde qui s'ouvre.
Le soir, quand le professeur a terminé de lire l'histoire de Binh, il se dit qu'il faut absolument partager ce récit avec la classe.
Le professeur veut bien faire : il souhaite que ses élèves découvrent les drames causés par les guerres et les dictatures, autrement que dans les livres d'histoire ou à la télévision.
Quand Binh entend les premiers mots de son récit lus par le professeur devant toute la classe, elle se recroqueville sur sa chaise. Elle voudrait disparaître, devenir transparente. Elle ne voulait pas que ses amis sachent, elle ne veut pas être la réfugiée, l'étrangère, la rescapée. Ils vont dire qu'elle fait son intéressante, qu'elle est la chouchoute du prof, ou encore pire, ils vont avoir pitié d'elle. Plus rien ne sera comme avant.
20 ans plus tard, Binh se souvient encore de ce professeur qui a voulu bien faire, mais qui l'a trahie en livrant son intimité à toute la classe. Elle se souvient que, ce jour-là, elle a décidé de ne plus faire confiance, à personne : la trahison dresse des barrières, le monde se ferme.
