La terrasse
« Elle parle, le soleil toute la journée, des patios des bleus sublimes, des rues sillonnées ensemble et là la terrasse à boire s’il vous plait, lui, assis près d’elle. D’eux une flamme un jour d’un coup, ça les a pris, l’embrassement soudain, un feu joyeux. …
Elle parle elle lui parle de quoi lui parle-t-elle, de quoi peut-elle parler si ce n’est du miracle absolu de leur voyage, cette expérience surnaturelle. Ils ont quand même dû voler, oui voler au-dessus des nuages à une vitesse mécaniquement inhumaine avant de pouvoir se poser là, et toujours vivants avec ça. Puis maitriser tous les chevaux et conduire la carriole, traverser le bout de désert, les montagnes, les vallées d’oliviers, dormir nus sous des étoiles dont on ne sait si une d’entre elles vous filerait entre les doigts pour venir vous bang et c’est fini mais rien n’est venu ils ont repris la route au matin comme si de rien. »
3000 fois
« Non ce n’est pas une histoire d’habitude, ce n’est pas cette histoire-là, c’est juste que ça n’arrête pas, tu comprends, ma mère meurt chaque jour, plusieurs fois, elle meurt alors qu’elle ne devrait pas, je me souviens que je me disais dans le train la première fois ; je vais vers la mer où ma mère se meurt. Mais depuis je n’entends plus que ça, ça existait avant bien sûr, mais je n’entendais pas. Maintenant oui et je me sens démuni, je n’arrive pas à l’empêcher, j’ai juste ce mélange de colère et de tristesse à chaque fois que ça arrive, quoi que je fasse il y a toujours un moment où ma pensée s’échappe et je me dis non ce n’est pas possible, pas encore, ça ne va pas durer, ça ne peut pas durer, il faut qu’elle arrête de mourir, le jour, la nuit, c’est sans fin. »