On ne s'habitue jamais vraiment à la solitude. Moi, je ne pensais pas que ça m'arriverait un jour de devoir vivre sans compagnie. Me retrouver seule dans mon appartement le soir après le travail m'a toujours fait quelque chose. Franchir ma porte et constater que, ce soir encore, personne ne m'attendait, m'avait toujours fait un pincement au cœur. Et puis ce silence. Ce silence qui s'imposait à moi. J'avais pris pour habitude de mettre de la musique pour donner vie à mon appartement, et ainsi ne pas me laisser engloutir par le silence.
Je m'étais rendue compte que toute ma vie durant j'avais été comme ça. J'avais toujours été dans l'ombre des autres. Mettant de côté mes souhaits, mes avis, mes envies, comme s'ils avaient moins d'importance que ceux des autres.
Réalisant pour autrui leurs moindres souhaits, réalisant leurs moindres exigences. Toute ma vie durant, j'avais été l'ombre de moi-même. Comme si je n'avais pas vraiment existé. J'étais passée à côté. A côté de ce que je désirais, à côté de ce que je ressentais, à côté de qui j'étais. A côté de ma vie.
Ça fait des années que ça dure, des années que je veux passée inaperçue, que je veux le fondre dans la masse. Tout comme je ne souhaite pas faire de vagues, ni contredire qui que ce soit. Mais vivre ainsi, c'est vivre entre parenthèses. C'est mettre de côté ses opinions, c'est taire ses choix. J'ai le droit de donner mon avis, de ne pas être d'accord, d'exprimer mes pensées. Cela ne doit pas être un problème. J'ai le droit de porter de la couleur, d’être vue, d’être regardée.
- Dorian, c'est quoi le bonheur ?
- Ben, je ne sais pas trop. Ce que je sais, c'est que tout le monde lui court après en espérant le trouver. Mais moi je ne suis pas sûr qu'il soit si loin de nous que ça. Je crois surtout qu'on arrive pas à le voir.