AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Woland


Woland
30 décembre 2015
[...] ... Elle était là, étendue sous le drap, le visage tout contre l'oreiller. Je n'avais qu'à me jeter sur son corps, la frapper. Elle ne bougerait pas, elle ne pousserait pas un seul cri ; je ne lui en laisserais pas le temps ... Elle était déjà à ma portée, profondément endormie, ne se doutant de rien. Dieu, que les gens que l'on tue se doutent peu de leur sort ! Je voulais me décider mais n'y parvenais pas ; il dut m'arriver plusieurs fois de lever le bras et de le laisser retomber le long du corps.

Je pensai fermer les yeux et frapper. Impossible. Frapper les yeux fermés revient à ne pas frapper du tout, tant on risque de manquer son coup ... Je devais frapper, les yeux bien ouverts, de toutes mes forces. Je devais garder mon calme, retrouver mon calme, qui me semblait déjà compromis par la vue du corps de ma mère ... Le temps passait et je restais là, immobile et figé comme une statue, incapable d'en finir. Je n'osais pas ; après tout, c'était ma mère, la femme qui m'avait donné le jour et méritait pour cela d'être pardonnée ... Pourtant non, je ne pouvais lui pardonner parce qu'elle m'avait mis au monde. Elle ne m'avait fait là aucun faveur, absolument aucune ... Il n'y avait plus de temps à perdre. Il fallait se décider une bonne fois ... Un long moment, je restai debout, comme endormi, mon couteau à la main, image même du crime ... J'essayais de me dominer, de récupérer des forces de les concentrer. Je brûlais du désir d'en finir vite, vite, et de sortir en courant, pour aller quelque part m'écrouler à bout de souffle. Je m'épuisais ; voilà une bonne heure que j'étais près d'elle, que je semblais la garder, veiller sur son sommeil. Et j'étais venu pour la tuer, pour la faire disparaître, arracher sa vie à coups de poignard ! ...

Peut-être une autre heure allait-elle passer. Non, définitivement, non. Je ne pouvais pas, cela dépassait mes forces, faisait refluer mon sang. Je pensai fuir. J'allais peut-être faire du bruit en m'en allant ! Elle s'éveillerait, me reconnaîtrait. Non, je ne pouvais pas fuir non plus ; j'étais perdu de toute façon ... Je n'avais d'autre solution que de frapper, frapper sans pitié, rapidement, pour le plus vite possible en finir. Mais je ne pouvais pas non plus frapper ... J'étais tombé dans un bourbier où je m'enfonçais peu à peu, sans possible salut, sans issue possible ... La boue m'enserrait déjà le cou; J'allais mourir noyé comme un chat ... Je ne pouvais tuer ; j'étais comme paralysé ... [...]
Commenter  J’apprécie          20





Ont apprécié cette citation (2)voir plus




{* *}