CORALLINE, à part. —Comment ! Arlequin soldat?
ARLEQUIN.—Vive la gaieté, Coralline ! Hein, qu'est-ce que tu en dis? Est-ce que je fais assez bonne figure?
CORALLINE.—Félicitations ! Est-ce là la parole que tu m'as donnée de m'épouser?
ARLEQUIN.—Et pourquoi est-ce que je ne pourrais pas t'épouser?
CORALLINE.—Un de ces jours, tu partiras en campagne avec l'armée et tu me planteras là.
ARLEQUIN.—La belle histoire ! Toi aussi, tu partiras en campagne avec l'armée.
CORALLINE.—Non, non, si tu es fou, moi je ne suis pas folle. Va-t’en, je ne veux plus de toi !
ARLEQUIN.— Ah, chienne ! c'est comme ça que tu m'abandonnes?
CORALLINE.—Pourquoi t'es-tu fait soldat?
ARLEQUIN.—Pour manger et pour boire, pour être habillé, chaussé et ne rien faire de la
journée.
CORALLINE.—Pauvre sot, tu verras !
ARLEQUIN.—Je verrai? Qu'est-ce que je verrai?
CORALLINE.—L'hiver, quand il y aura de la neige, et l'été, quand il fera soleil, tu seras sur les remparts, le fusil sur l'épaule : Qui va là? Tu coucheras sur la paille, tu te fatigueras à faire l‘exercice, et si tu commets une faute, on te donnera des coups de bâton.
ARLEQUIN.—Des coups de bâton?
CORALLINE. — Et quels coups de bâton! Et puis tu iras à la guerre, au risque de perdre un bras, ou de perdre un œil, ou de perdre la tête.
ARLEQUIN.—La tête? Je ne veux plus être soldat!
Acte I, scène XIV