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Citation de Charybde2


Le capitaine Colaprico n’aime pas les chevaux.
Surtout en Afrique, à la colonie, à Massaoua, où ils sont trop épuisés et trop nerveux, toujours à cause de la chaleur. Pour dire la vérité, il ne les aime pas non plus en Italie, et il n’aimait pas davantage les vieux poneys de Bardi, les chevaux de la ferme de Putignano où il était né et avait grandi quand son père servait dans les Pouilles, pas plus que le persan du manège que ce dernier l’avait contraint à fréquenter quand ils avaient déménagé à Milan (« tu verras que ça te servira, Pierino, tu verras »). Ensuite, d’élève carabinier jusqu’au grade de maréchal des logis, il n’avait plus rien eu à voir avec les chevaux pendant au moins dix ans, jusqu’à ce vieil animal de race salernitaine qu’on lui avait attribué à l’École d’aspirants au grade de sous-lieutenant, dixième sur vingt-deux justement à cause des points perdus avec l’équitation (« tu le vois, Pierino, que c’était utile ? »).
Il préférait les flancs larges comme des fauteuils des mulets de l’armée, qui trottaient droit et tranquilles, tête baissée, lui laissant le temps de penser à ses affaires, et en quatre ans de colonie au commandement de la Compagnie royale de carabiniers de Massoua, il avait presque toujours réussi à les utiliser, avec soulagement et satisfaction. À part à Adouan, où le véloce lipizzan lui avait été bien utile, autant durant la bataille que quelques heures plus tard, lors de la retraite.
S’il n’avait pas été pressé, il aurait pris carrément un chameau pour faire les quelques kilomètres entre Massaoua et Archico, mais le gouverneur était en train de déménager la capitale de la colonie à Asmara, et on y avait aussi besoin du commandement des carabiniers royaux tout de suite.
Ainsi, quand il entre sur l’esplanade de l’entrepôt par la porte grand ouverte, le capitaine est déjà nerveux, à cause de la course et aussi parce qu’il pense à la caisse contenant ses livres de criminologie, le Lombroso, le Krafft-Ebing, le traité sur les poisons, cette nouvelle étude sur l’anthropométrie et les empreintes digitales, perdue parmi les caisses et les malles prêtes à partir pour le haut plateau, et Dieu sait où et quand il la retrouvera, à Asmara. L’adjudant Bertone le voit et court à sa rencontre, parce qu’il le connaît, le capitaine Colaprico, si ses fines moustaches sont si droites au-dessus de ses lèvres, cela signifie qu’il est en colère.
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