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Citation de Charybde2


Le centre ne suscitait plus autant d’intérêt qu’à son ouverture. L’heure de gloire était révolue, et avec elle, l’attention des mécènes. Elle avait vieilli elle aussi, et si son état était loin d’être à l’image de la cour déjetée qu’elle traversait, un seau au bout du bras, elle avait perdu la fraîcheur et la force de persuasion qui attirent les investisseurs. Son éclat était plus mat, son travail plus lent, sa passion plus profonde mais moins communicative. Elle s’était lassée du public.
Elle avança devant la grange dont la porte avait finir par se gauchir complètement, et nota que le fenestron n’était toujours pas occulté. Elle jeta un œil aux étais du fenil et inspira à pleins poumons, le nez vers la lucarne d’où débordait le foin de l’année. Cette première bouffée lui ouvrait l’appétit et annonçait les odeurs vivantes de l’étable. Chaudes, denses, aussi accueillantes que les bêtes qui se réveillaient en reniflant l’avoine et la maîtresse qui l’apportait.
Contrairement aux autres modules du centre – excepté le laboratoire et la salle de soins strictement maintenus aux normes -, l’écurie était la fierté personnelle d’Aliona. Elle adorait ses chevaux. Ses cinquante petits corps musclés, sa harde vivante, plus farouche que des perdrix, plus domestique que les chèvres qui broutaient, l’été, les jardinières de civette qu’elle remisait dans sa chambre, fenêtre grande ouverte.
Ils la recevaient avec des secouements de crinière, des cris d’appel et des oreilles droites. Elle avait pour chacun un geste de la main, une flatterie, un mot ou une épluchure de carotte. Elle parcourait une première fois le bâtiment en leur parlant, tandis qu’elle versait l’avoine dans les mangeoires. Elle attendait qu’ils plongent la tête dans les auges et qu’ils soufflent sur les dernières poussières, avant de revenir sur ses pas en débloquant tous les loquets, leur laissant le soin de pousser le vantail du chanfrein et de la rejoindre au bout de l’étable, piaffants, avides d’air neuf.
Elle les connaissait individuellement jusque dans les recombinaisons les plus secrètes de leur ADN. Elle les avait faits.
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