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Citations de Charles Blanc (168)


Si l’enseignement public est resté si longtemps muet sur les questions d’art, cela tient sans doute à la prédominance de certaines idées mal comprises. Par une abominable confusion, tant de chastes divinités, dont la présence élève l’âme et la purifie, étaient regardées comme des images suspectes enveloppant l’esprit du mal et toutes pleines de séductions dangereuses. De là l’éloignement de l’institution cléricale pour les arts païens, sentiment qui, dans nos collèges laïques, se traduisait par le silence. Et cependant, les grands papes qui firent peindre, sur les murailles du Vatican, l’École d’Athènes et le Parnasse, qui consacrèrent à l’Apollon, à l’Antinoüs, les plus belles chambres de leurs palais, ces pontifes à jamais illustres et qui, eux aussi, furent infaillibles, ne croyaient pas faire une œuvre impie en présidant à la résurrection de la beauté antique. Pourquoi donc serions-nous plus chrétiens que Jules II et Léon X ?
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Quelques philosophes ont pensé que l'idée du beau était un pur ouvrage de l’esprit, qui, en comparant des êtres imparfaits et en supprimant les défauts de chacun d’eux, s’élevait à la connaissance d’une perfection absolue. C’est ainsi, disent-ils, que le peintre Zeuxis forma son Hélène en réunissant les beautés éparses des plus jolies femmes d’Agrigente. Mais comment discerner les défauts d’une figure, si l’on n’a une idée préconçue de la beauté ? Comment Zeuxis aurait-il choisi la bouche de celle-ci, la main de celle-là, le pied d’une autre, s’il n’avait été dirigé dans son choix par une lumière intérieure ? Qui ne sent, du reste, que le rapprochement de parties séparément belles pourrait former un tout monstrueux, si l’artiste ne portait en lui le sentiment du lien qui doit les unir et en constituer l'harmonie ? Un tel sentiment, il le puisera dans cette conscience au sein de laquelle réside l’idée du beau, et qui est sans doute une secrète réminiscence de la grâce primitive du genre humain. Apprendre, dit Platon, c’est se ressouvenir.
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Quel profond savoir, quelle variété de connaissances ne supposent pas les monuments primitifs de l’Égypte et de l’Inde dans les corporations sacerdotales qui les conçurent ! C’était, encore une fois, toute une philosophie qui était exprimée par ces pagodes, ces pyramides, ces labyrinthes, et l’architecte si longtemps classique des temps modernes, Vitruve, était loin d’exagérer l’importance de son art lorsqu’il écrivait, au siècle d’Auguste, plus de quatre mille ans après la construction des Pyramides : « L’architecte doit savoir écrire et dessiner, être instruit dans la géométrie et n’être pas ignorant de l’optique ; avoir appris l’arithmétique et savoir beaucoup de l’histoire ; avoir bien étudié la philosophie, avoir connaissance de la musique et quelque teinture de la médecine, de la jurisprudence et de l’astrologie. »

Mais par cela même qu’ils représentent l’esprit des peuples, leurs croyances, leur manière de concevoir Dieu et le monde, les monuments de l’architecture sont les pages les plus sincères de l’histoire : voilà pourquoi leurs débris mêmes nous apprennent tant de choses sur la vie morale des sociétés. Les ruines de l’architecture sont les ossements fossiles de l’histoire humaine.
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Toute laideur nous fait souvenir de la beauté.

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Harmonie. Le mot harmonie, en grec αρμονία signifie, dans son acception primitive, liaison, assemblage, emboîtement. Les auteurs grecs l’appliquaient à l’architecture. Pausanias l’a employé en parlant des murs cyclopéens de Tyrinthe, formés de très grandes pierres entremêlées de plus petites. « Chacune de ces petites pierres servait l’harmonie aux grandes. » C’est donc de l’architecture que les musiciens ont emprunté le mot harmonie, que l’on penserait avoir été créé tout exprès pour la musique.
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Celle-là je ne résiste pas à la partager ...

L’union du dessin et de la couleur est nécessaire pour engendrer la peinture, comme l’union de l’homme et de la femme pour engendrer l’humanité ; mais il faut que le dessin conserve sa prépondérance sur la couleur. S’il en est autrement, la peinture court à sa ruine ; elle sera perdue par la couleur comme l’humanité fut perdue par Ève.
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Hégel a dit avec une sagacité admirable : « Dans la sculpture et l’architecture, les formes sont rendues visibles par la lumière extérieure. Dans la peinture, au contraire, la matière, obscure par elle-même, a en soi son élément interne, son idéal : la lumière ; elle tire d’elle-même sa clarté et son obscurité. Or l’unité, la combinaison du clair et de l’obscur, c’est la couleur. »
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Mais quelles étaient donc ces pressantes affaires qui l'appelaient si impérieusement à Florence? Raphaël, sans aucun doute, était impatient de voir le fameux carton de la Guerre de Pise que Michel-Ange venait de terminer après sa fuite de Rome, dans les premiers mois de 1506, et le carton non moins fameux que Léonard de Vinci devait exposer le même jour au jugement des Florentins. Quelle impression durent faire sur l'élève encore docile du Pérugin ces dessins prodigieux, dont la science paraissait hardie et n'était que profonde : ici, les figures terribles et palpitantes de Léonard et ses chevaux héroïques; là, les soldats de Michel-Ange, tiers comme des héros, élégants comme des dieux descendus de l'Olympe!
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La mémoire, ce fut la grande, la prodigieuse faculté d'Horace Vernet ; ce fut le secret de ce talent facile, abondant, incisif, qui, à force de vraisemblance et d'approximation, devait séduire si fortement le gros de la société française, d'une société qui, en fait d'art, se contente volontiers de l'a peu près, se paye du semblant des choses, aime l'éloquence terre à terre, et qui, toujours pressée de jouir, prodigue ses sympathies à ceux qui se font comprendre vite en disant avec vivacité ce qui est dans l'esprit de tout le monde.
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Les déviations les plus légères, les inflexions les plus subtiles servaient de la sorte à redresser les erreurs de la vue, et ici encore la délicatesse du mensonge appuyait l’expression de la vérité. Quant à ces courbes merveilleuses, c’était la contemplation de la nature qui les avait inspirées aux Grecs. Plus d’une fois, nous plaçant à l’orient du Parthénon et regardant la mer du haut de ces ruines, dans un jour de calme, nous avons été frappé de la similitude qui existe entre la courbe du fronton occidental et celle qui dessine l’horizon de la mer, de l’île d’Égine au cap Sunium. Les deux arcs paraissent avoir le même rayon… Qui sait encore si de ces courbes mystérieuses ne résulte pas l’étrange effet de ce temple fameux , dont la grandeur réelle est si fort au-dessous de la grandeur apparente ? Qui sait si, en évitant partout la ligne [droite] qui est le plus court chemin d’un point à l’autre, on n’a point trompé secrètement le spectateur et agrandi l’aspect du monument ?
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Dans l’Afrique septentrionale, depuis l’Égypte jusqu’au Maroc, en Orient et dans le midi de l’Italie, les édifices sont surmontés de plates-formes, et le caractère de l’architecture en est profondément modifié, car la ligne horizontale qui les termine exprime, encore une fois, le calme, la paix, le repos, parce qu’elle annonce la pureté du ciel et rappelle la tranquillité de la mer.

De tout temps il en fut de même dans ces contrées, ainsi qu’en témoignent la Bible et les écrivains antiques. « Quand tu bâtiras une maison neuve, dit le Deutéronome, tu feras des défenses autour de ton toit, afin que tu ne rendes pas ta maison coupable de sang si quelqu’un tombait de là. » On peut ajouter à cette preuve le passage de l'Odyssée où Homère raconte la mort d’Elpenor, un des compagnons d’Ulysse. Étant allé dormir sur la terrasse du palais de Circé, Elpenor oublia en se réveillant que la terrasse n’avait point de parapet, et s’étant dirigé, à moitié endormi encore, du côté opposé à l’escalier, il se précipita sur le pavé et se tua.
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Les ruines de l’architecture sont les ossements fossiles de l’histoire humaine.
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GUILLAUME KALF
NÉ EN 1630. — MORT EN 1657
Si l 'on voulait donner une définition de l'art, on la trouverait aussi bien dans une cuisine de Kalf que dans tel sujet héroïque. En effet, l'art est aussi présent au fond de ce vase de cuivre doré par la lumière, ou sur les bords de ce gobelet d'argent, qu'au milieu des graves compositions dont l'histoire et la philosophie ont fourni le sujet et la grandeur. Chose étrange et qui tout d'abord peut ressembler à un paradoxe ! Celui-là est plus artiste qui n'a besoin pour faire un tableau de prix que d'un chaudron renversé et d'une botte de poireaux, que tel peintre nourri dans le sein des académies et capable de traiter, par exemple, avec des gestes convenus et des figures banales, la continence de Scipion.
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Il existe une pierre gravée antique où l’on voit Prométhée modelant un squelette. Dans une autre pierre, le sculpteur est représenté mesurant sa statue, et, dans une autre encore, pesant les membres du corps humain. Ce sont là des témoignages irrécusables du profond respect des anciens pour les proportions et de la connaissance qu’ils en avaient. Avant de ravir le feu du ciel, Prométhée songeait à établir la charpente osseuse de l’homme, à mesurer tous ses membres, à les balancer selon les lois de la symétrie et de l’équilibre.
(ch. VII. DES PROPORTIONS DU CORPS HUMAIN.)
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On le chargea d'orner de paysages le palais Rondanini et la galerie Borglièse. Il les exécuta dans le sentiment fier de Salvator; il choisit les plus terribles accidents de la nature, d'affreux ravins où se précipitent des torrents qui bondissent d'un rocher à l'autre, entraînant avec eux des troncs d'arbres déracinés; mais les figures qu'il peignit au fond de ces abîmes ne sont pas aussi sombres, il s'en faut bien, que les brigands de Salvator; en leur ôtant le casque et le haubert, on trouverait dessous ces mêmes pêcheurs nonchalants que Vernet savait si bien asseoir ou coucher sur le premier plan de ses calmes. L'étude de Salvator eut cependant pour Vernet ce résultat, qu'elle fortifia son coloris, lui donna de la fermeté dans la touche, et lui inspira ces teintes rembrunies et mâles auxquelles on reconnaît aisément les tableaux datés de son séjour en Italie.
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Ainsi n'est plus l'art qui tourne autour de la nature; c'est la nature qui tourne autour de l'art, comme la terre autour du soleil.
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C'est à Venise maintenant qu'il faut nous transporter pour y voir s'accomplir une des grandes évolutions de la Peinture, un progrès si considérable et si désirable que l'on est surpris de le voir se produire un siècle et demi seulement après la renaissance de l'art: la connaissance et le sentiment de la couleur. On peut s'étonner, en effet, que, le coloris étant ce qui distingue particulièrement la peinture des autres arts, les lois de la couleur aient été si longtemps inconnues aux maîtres italiens, surtout à ceux de Florence, alors que, depuis Giotto jusqu'à Filippo Lippi, ils avaient déjà porté si loin l'expression de la peinture par le dessin; mais la notion et le sens des couleurs ayant été de tout temps le privilège des Orientaux, il était naturel que les premiers coloristes italiens fissent leur éducation à Venise, puisque cette ville de marchands et de navigateurs était constamment en rapport avec l'Orient et que sa population indigène, originaire de l'Asie, en avait apporté l'amour du faste, le goût des brillants costumes, des riches étoffes, des armes rehaussées de pierreries, des chamarrures et de tout ce qui comporte la variété et l'éclat des couleurs.
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Enchaînés de la sorte au service de l'Église, les artistes espagnols, en peinture comme en sculpture, marquent toutes les productions à l'empreinte d'un esprit grave et ascétique; elles semblent avoir été méditées dans l'obscurité sévère et silencieuse du cloître. Par réaction contre la renaissance du paganisme, qui glorifiait la beauté la beauté du corps, ils prennent plaisir à représenter la laideur, la misère, les macérations, les tortures, les visions effrayantes de l'enfer et du purgatoire, comme s'il n'y avait rien de mieux à faire pour l'ignorant que de lui inspirer la terreur d'une divinité sauvage, et comme si al beauté, l'harmonie, l'exquise convenance des formes créées par Dieu n'était pas aussi un moyen de lui faire gagner des âmes !
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Maintenant, si nous montons au sommet de la création terrestre, nous voyons tout à coup apparaître la raison. Ce qui était animé est devenu intelligent, ce qui était symétrique est devenu beau. La plante était muette, l’animal avait une voix, un cri : l’homme seul a le langage et la mélodie. Le végétal était captif, la bête se mouvait dans le cercle fatal de ses instincts : l’homme seul est libre, et il est libre en vertu du principe même qui lui fait comprendre la nécessité. En lui la vie extérieure de l’animal est devenue collective : il communique non seulement avec ses contemporains, mais avec tous les êtres qui furent distribués dans l’étendue des âges ; il vit de la vie universelle de l’espèce, c’est-à-dire de la seule vie qui puisse développer l’être. « L’humanité, dit Pascal, est un homme qui vit toujours et qui apprend sans cesse »
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L’écrivain ou l’orateur ont étudié chacune des expressions de la langue ; ils en connaissent la signification et la valeur, la couleur et le relief ; mais ces connaissances ne font ni un beau livre ni un beau discours, et si tous les mots sont dans le vocabulaire, l’éloquence est dans l’âme de l’orateur.
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