Enchaînés de la sorte au service de l'Église, les artistes espagnols, en peinture comme en sculpture, marquent toutes les productions à l'empreinte d'un esprit grave et ascétique; elles semblent avoir été méditées dans l'obscurité sévère et silencieuse du cloître. Par réaction contre la renaissance du paganisme, qui glorifiait la beauté la beauté du corps, ils prennent plaisir à représenter la laideur, la misère, les macérations, les tortures, les visions effrayantes de l'enfer et du purgatoire, comme s'il n'y avait rien de mieux à faire pour l'ignorant que de lui inspirer la terreur d'une divinité sauvage, et comme si al beauté, l'harmonie, l'exquise convenance des formes créées par Dieu n'était pas aussi un moyen de lui faire gagner des âmes !
La peinture espagnole, tout en conservant sa physionomie propre, s'enrichit alors de quelques emprunts faits aux peuples vaincus. Triomphante sur les mers, maîtresse en Italie, l'Espagne avait mis le pied sur les Amériques et elle venait d'entrer dans son ère de prospérité et de gloire.
Ce fut seulement par les conquérants arabes qui fut introduites en Espagne une civilisation artiste, dont les traits dominants ne ressemblaient en rien à ceux de l'art grec ni à ceux de l'art romain.