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5/5 (sur 1 notes)

Nationalité : Italie
Né(e) à : Rome , le 16/03/1951

Source : Wikipédia
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Bibliographie de Claudia Patuzzi   (1)Voir plus

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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
– Qu'est-ce que la Philosophie, maman ?
– Je n'ai jamais entendu ce mot. Une herbe médicinale ?
– Un jeune homme me l'a dit qui sait lire et écrire. Il dit l'aimer plus que lui-même.
– Alors c'est une femme, une étrangère, une Turque ou pire, une juive. Une infâme !
– Il dit qu'il l'aime plus que la richesse.
– Alors, elle est très belle et très licencieuse…
– Il dit qu'elle vivra en lui éternellement…
– Elle est donc très experte, pour mieux le séduire… Et toi, comment le connais-tu ce jeune homme ?
– Je l'ai vu par hasard une seule fois…
– Bien ! Ce n'est pas l'un des nôtres…
– Et moi, pourquoi je n'écris pas ?
– Parce que les pauvres n'ont pas besoin d'écrire…
– Et pourquoi je ne lis pas ?
– Pareil. Tu n'es qu'une femme ! Ce n'est pas la peine…
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Aujourd'hui aussi les gargouilles de Notre-Dame veillent sur les riches et les pauvres avec le même ricanement impartial, mais le fleuve ne sépare plus le monde citadin sur un mode aussi manichéen qu'à l'époque.
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Regard fut attirée par la foule qui obstruait la rue près d’une fontaine : sur une estrade en bois, bien visible, se dressait un immense tableau vivant.

Soudain, elle gémit, une douleur aiguë et lancinante la transperça jusqu’au fond de l’âme, tandis que des taches violettes et bleuâtres flottaient devant ses yeux comme des nénuphars. Elle ferma ses paupières et les rouvrit aussitôt pour s’assurer que ce qu’elle voyait était bien réel : sur la scène, inondée par les rayons du soleil au zénith qui se réfractaient en de multiples directions, tel un arc-en-ciel traversé par la pluie, se dressait un immense vitrail rectangulaire qui, en triptyque, représentait trois scènes d’un bleu intense.

Au centre du triptyque trônait une figure vêtue de blanc et recouverte d’un manteau rouge, la tête ornée d’une immense mitre, si parfaitement dessinée qu’elle semblait vivante, et tenant trois boules dorées dans une main et un bâton dans l’autre. À droite de la scène centrale se trouvait un gros tonneau de bois rempli de saumure ; sur la gauche, trois fillettes en chair et en os, avec des bonnets blancs sur la tête et de longs cheveux dénoués, se tenaient immobiles, le visage empreint d’une expression d’étonnement et de stupeur.

Soudain, la figure centrale bougea, révélant sa nature humaine...
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Un jour Géberlin amena Regard dans un lieu qu’il appelait de façon pompeuse l’« Oratoire ».
C’était une pièce plutôt exiguë, creusée dans la cave et séparée du laboratoire par une draperie orientale que le vieil homme avait héritée, avec le tapis turc qui recouvrait le plancher, de sa famille d’origine chiite.
Ce jour-là, il lui demanda de s’agenouiller et de répéter avec lui ces mots énigmatiques :
« Lege, lege, relege, labora et invenies !
Depuis la nuit jusqu’à l’aube lumineuse, la porte étroite tu devras franchir !
De la putréfaction jusqu’à la dissolution, tu devras cheminer !
Les noces chimiques avec les noces mystiques tu devras célébrer !
De syllabe en syllabe, l’alphabet divin tu devras employer ! »
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Regard était seule comme toujours, elle avait désormais dix ans. Perdue dans ses rêveries enchantées, elle errait ici et là sans but. Elle n’était escortée que par un faible rayon printanier, car elle était triste. Certes, son ange gardien était présent mais, comme d’habitude, sauf cas exceptionnels, il était invisible.

Sa mère avait fermé la porte tout en la poussant brusquement dans la ruelle, tandis qu’un cordonnier corpulent s’introduisait furtivement derrière elle.

Sans comprendre, d’un geste furieux, Regard avait tiré sa longue tresse de sous de la porte, en froissant le ruban que Béatrice avait si soigneusement noué ; enfin, elle avait essuyé ses joues du revers de la main, n’ayant pu retenir deux lourdes larmes…

Ce jour-là, pour la première fois, Regard avait le sentiment que quelque chose d’injuste venait de se produire.

Cependant, elle quitta nonchalamment l’impasse, que l’ombre humide des murs moussus rendait à cette heure encore plus sombre, et se dirigea vers les Halles.

Tout de suite après, telle une boussole affolée, elle changea de direction, suivant le battement saccadé de son cœur meurtri ou le carillonnement joyeux des cloches de Saint-Nicolas, suivi par celui plus riche et noble de Saint-Eustache et par le tintement lointain et argentin de l’abbaye de Saint-Denis.
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- Allons, fais ta natte.
- Pourquoi ?
- Parce que c’est le matin.
- Le matin ?
- Oui, le soleil se lève.
- Mais d’où vient le soleil ?
- De l’autre côté.
- Quel autre côté ?
- Celui qui n’est pas dans le noir.
- Et où est-ce qu’il va dormir ?
- Dans l’océan.
- Il ne prend pas froid ?
- Il se change en lune.
- Et la lune elle va où ?
- De l’autre côté de la terre, celui qui est dans le noir.
- Mais pourquoi elle est ronde comme une hostie ?
- Pour qu’un coquin l’avale.
- Et le soleil, comme fait-il pour bouger ?
- Le soleil tourne autour de la terre et elle reste immobile comme une nèfle.
- Mais alors, sur quoi s’appuie-t-elle, la Terre ?
- Je ne sais pas. Sur les épaules d’un géant, je crois …
- Et le géant, sur quoi s’appuie-t-il ?
- Ça, Dieu seul le sait … lève-toi : je vais te faire ta natte.
- Les géants, il y en a encore ?
- Ça dépend.
- Comme saint Georges ? Saint Marcel ? Comme Charlemagne ?
- Oui.
- Le diable aussi était un géant, n’est-ce pas ?
- Le diable était un ange gigantesque, il était très beau et jaloux de Dieu.
- Qui sait ?
- Je sauverai la ville des Huns comme Geneviève ?
- Peut-être …
- J’aurai une statue rien que pour moi dans la basilique avec elle ?
- Les statues sont dans les maisons des princes et dans les églises pour être adorées par les fidèles, mais si tu sauves la ville …
- Elles ont une âme, les statues ?
- Qu’est-ce que tu dis ?
- J’ai toujours l’impression que la statue de Geneviève me regarde, qu’elle respire…
- Seules les statues des saints ont une âme.
- Et moi, maman, j’ai une âme ?
- Bien sûr…Il est tard. Lève-toi, je dois travailler.
- Elle est transparente, n’est-ce pas ?
- Quoi donc ?
- Mais mon âme, maman !
- Elle est blanche comme un drap tout propre.
- Et Madelaine, elle était belle ?
- C’est ce que racontent les Evangiles, ma petite.
- Et son âme, elle était comment ?
- Elle était sale.
- Mais Jésus l’a nettoyée, n’est-ce pas ?
- Eh bien … disons qu’il a lavé son âme …
- Tu te trompes, maman, c’est Madeleine qui a lavé les pieds de Jésus, lui, il lui a seulement pardonné, tu ne te souviens pas ?
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– Comment est l’Île ?
– C’est une île.
– Elle est loin d’ici ?
– Non, elle est au milieu du fleuve, ma petite.
– Et comment est-elle ?
– Pleine d’églises, d’immeubles et de rues. Il y a aussi une cathédrale et une chapelle d’or.
– Comment est la cathédrale ?
– Toute de pierres et de sculptures, haute comme le Paradis avec, à l’intérieur, la tête momifiée de saint Marcel.
– Et la chapelle d’or ?
– Elle est entièrement dorée et peinte. Elle contient l’énorme patte d’un dragon.
– Est-ce que je peux y aller, maman ?
– L’Île est interdite, ma fille.
– Pourquoi ?
– Parce que certains se perdent sur l’Île et sur la rive gauche et ne reviennent plus.
– Qu’est-ce que c’est, la rive gauche ?
– Le pays des savants qui parlent le latin.
– C’est quoi le latin ?
– La langue de l’Église et des apôtres, la langue des savants et des moines.
– Est-ce que je peux l’apprendre ?
– Non ! C’est interdit aux femmes et aux pauvres comme nous !
– Pourquoi ?
– Parce que c’est dangereux. Le latin appartient à l’évêque et au roi, aux clercs et aux prêtres, mais attire comme un aimant les jongleurs et les saltimbanques ainsi que les jeunes débauchés qui boivent dans les tavernes jusqu’au petit jour et qui importunent les petites filles ! Sans compter les seigneurs au manteau bordé de fourrure qui méprisent les pauvres comme nous : eux aussi s’accrochent au latin, tout comme ces voyageurs issus de pays lointains avec leurs langues incompréhensibles, se donnant rendez-vous auprès des boutiques peuplées de toutes les tentations du démon, surtout sur les ponts… L’Île est le démon et la rive gauche est son lit. – Et si j’étais capable de revenir ?
– Tu reviendrais changée. L’Île change tous ceux qui s’y rendent.
– Je ne peux pas changer, maman ?
– Non, la fleur reste fleur, bouton, bourgeon ou graine, mais dans un vase elle meurt et ne fleurit plus.
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C'est parfois dramatique de se trouver à mi-chemin entre la naissance et la mort : aucun de ces deux évènements extrêmes n’est visible et le malheureux passant risque de commettre l’erreur de se croire éternel. C’est alors que le noir et le rouge, en se mêlant, donnent le violet. C’est ainsi que naissent l’enfer et le paradis, ou d’immenses encyclopédies parfaitement inutiles.
Le garçon, encore lié au cordon rouge du souvenir placentaire, risque sa vie parce qu’il oublie la mort ; le vieillard, que le jeu de la mémoire lie au passé, finit par atteindre avec sérénité, dans un parcours semblable à celui de l’écrevisse, les eaux ténébreuses de l’autre extrémité.
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Gudule entra dans le laboratoire avec une expression furieuse.
– Pourquoi as-tu choisi la petite fille plutôt que moi ? dit-elle.
– Parce que tu te fatiguerais trop à surveiller l’athanor, tu es trop vieille, n’as-tu pas cent ans ?
– C’est vrai. Mais c’est le signe que le grand œuvre est déjà en moi !
– Te crois-tu immortelle Gudule ?
– Eh bien, je ne me sens certainement pas mal à mon âge, grâce à la volonté de Dieu et des prophètes !
– Tu oublies Mahomet !
– Tais-toi !
– Je blaguais… La petite me plaît, elle est silencieuse, patiente, obéissante…
– Elle est la fille d’une mauvaise femme, de la lavandière, et donc…
– Et donc quoi ?
– La mauvaise herbe pousse toujours sur la mauvaise terre…
– Tu es injuste, Gudule, cette enfant est claire comme le soleil et ses cheveux d’or et d’argent semblent jaillir de la distillation ultime !
– Ils deviendront humides, la pluie les baignera tandis que le soleil sera obscurci par des nuages noirs…
– Est-ce une prophétie ? Es-tu une sorcière Gudule ?
– Oh non ! C’est simplement une idée, une simple idée, Géberlin !
– Tu as peur de la petite ?
– Qu’est-ce que tu racontes ! C’est moi qui guéris tout le monde dans la ruelle, interroge les gens !
– Alors laisse la petite tranquille.
– C’est elle qui me scrute toujours et ne me parle jamais !
– Que voulais-tu Gudule ?
– Rien !
Je voulais seulement le nom d’un produit et sa composition, Géberlin !
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Ce fut grâce à ses cheveux cendrés qui, gorgés de placenta et enroulés comme une pelote de laine autour du cordon ombilical, lui arrivaient déjà jusqu’à la taille, que l’enfant ne fut pas étouffée à sa naissance, suivant l’usage en vigueur chez les pauvres, ni enveloppée dans de vieilles hardes, avec le nom d’une sainte protectrice griffonné sur un bout de chiffon, dans l’espoir d’une éventuelle adoption.
En revanche, elle reçut un prénom singulier, « Regard » - lequel ne signifie sans doute rien d’autre que ce qu’il dit : « regard, coup d’œil ».
- Regarde ! D’étaient exclamées sa mère et Gudule en voyant cet écheveau de poils luisants sortir, tel un chaton humide, de l’antre cramoisi de la vie.
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