L'assaut du 10 août n'a pourtant rien d'une attaque surprise que le camp royaliste n'aurait pas eu le temps de parer. Depuis le début du mois, la tension n'a cessé de monter dans Paris et les craintes d'un coup de force à venir sur les Tuileries sont vives.
Depuis le XIXe siècle, les aventures - présentées comme authentiques - du baron de Batz ou encore du chevalier de Rougeville constituent le fonds de commerce d'une certaine historiographie réactionnaire ou sensationnelle qui entretient l'idée que de grandes conspirations royalistes ont échoué d'un rien au dernier moment alors que leur succès aurait dû offrir à la France une destinée contre-révolutionnaire bien moins sanglante.
L'extrême violence des combats a frappé les contemporains….
A plusieurs reprises, dans les mois qui suivent l'insurrection, la Convention a cherché à rendre visible, dans son enceinte même, les souffrances éprouvées par les citoyens qui ont osé braver le feu des défenseurs du château, comme ce 30 décembre 1792 où défilent à la tribune "des veuves, des orphelins, des patriotes mutilés et couverts de blessures".
Avant d'être une défaite politique qui marque une étape décisive dans la proscription de l'aristocratie, le 10 août 1792 est une défaite militaire révélatrice de l'obsolescence opérationnelle et de l'inutilité tactique d'un corps de chevaliers réunis en carré autour du roi. C'est aussi une blessure d'orgueil que les Mémoires qui posent leur auteur en combattant cherchent à soigner.
D'un côté le grand récit royaliste, le 10 août 1792 comme une machination sanguinaire livrant les Tuileries à des hordes de "brigands" ; de l'autre, le grand récit révolutionnaire, le 10 août 1792 comme liquidation légitime du grand complot aristocrate destiné à finir en "Saint-Barthélemy des patriotes".