Joli livre tout mince, couché à l'italienne où les touches de pluie colorées d'Erika Povilonyté disent l'art des nuances. Et pareillement sobre, la parole de Denise Desautels questionne les valeurs violettes, avec énigme. Certaines sont élégantes, d'autres graves. La recherche de sens n'est jamais loin.
On peut le lire dans l'ordre puis le relire à l'envers tant le fil peut supporter les jeux élastiques de la lecture.
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J'ai été attiré par la valises et les chaussures de la photographie sur la photo de couverture.
Les textes de l'autrice qui accompagnent les œuvres de l'artiste Sylvie Cotton ne sont peut-être pas ceux par lesquels passés pour découvrir ce qui semble être la caractéristique de la poétesses : un style d'écriture dsouvent décrit comme poétique, évocateur et lyrique.
Si ces textes ont une belle musicalité, ils sont trop techniques pour moi.
Je laisse ce style de poésie aux aficionados.
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Denise Desautels, grande poétesse québécoise, a reçu pour son recueil Disparaître le prix Appolinaire, considéré comme le Goncourt de la poésie. Première québécoise depuis Gaston Miron en 1981 à être honorée par ce prix, elle s’inspire de l’œuvre de l’artiste multidisciplinaire Sylvie Cotton pour forger les chapitres de son œuvre.
J’avais le goût de connaître une parcelle de l’œuvre de cette dame et c’est par ce recueil que la poétesse entre dans ma demeure. Bien m’en pris car quelle rencontre!
Les mots se posent, je prends le temps d’assimiler la grande noirceur et l’étrange clarté qui parsème sa poésie. Je n’ai pas tout compris mais là n’est pas le but. Les mots s’enchaînent dans le corps dedans comme dehors. La mort est très présente, comme la musique, l’art, le corps par son crâne et ses os.
À lire, relire, regarder, mijoter…comme un bouillon de poulet pour l’âme… comme un voluptueux contact avec un brin de folie!
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" J’écris loin l’amer obstinément
sans maison d’enfance
en femme qui marche "*
C’est une saisissante lecture que celle de la poésie de Denise Desautels. Grande figure de la poésie contemporaine québécoise et francophone, elle a vécu la Révolution tranquille, période des années 60-70 durant laquelle le Québec a connu d’importants mouvements de revendications qui entraîneront des changements socio-économiques mais aussi culturels.
En plein essor du mouvement féministe d’alors, dans son prolongement, va naître un nouveau champ littéraire, celui de l’écrit de l’intime, autobiographique. C’est dans ce contexte que l’écriture de Denise Desautels va émerger et prendre sa place.
Les deuils successifs, la douleur marquent son écriture. Son inspiration vient d’une enfance sans père (celui-ci meurt alors que l’auteure n’est âgée que de 5 ans) et de l’emprise d’une mère dévorante. Cette jeunesse douloureuse s’impose comme le point central de son œuvre poétique.
L’écriture n’agit pas comme un exutoire mais permet seulement de mettre une parole sur des non-dits, sur un silence devenus étouffants, structurants de la personne. Évoquer ces maux passés et présents, c’est explorer sa part de douleur, s’habituer à l’obscurité pour entrevoir la lumière, c’est s’immerger dans le silence pour percevoir la pensée, la parole rédemptrice.
Écrite en vers libres, sans recherche de la rime, j’ai été touché par l’écriture de Denise Desautels. Il y a en elle une grande cohérence, une sensibilité et une lucidité rares, une compréhension du lien qui nous unit au monde et aux autres.
Bien que née d’une époque de grandes revendications, la poésie de Desautels n’a rien d’un militantisme, d’une idéologie. Son écriture trouve sa source profonde dans l’intime et ses affects, dans l’émotion, la douleur. Plus que féministe, elle est bien plus une écriture au féminin.
" votre ici est mon ailleurs
table d’écriture, dictionnaires, colères,
vertiges et volets clos
votre ici, aujourd’hui mien
face à un ultime dépaysement de vos ailleurs
le monde – l’étroit et le large
âprement grandit, va au-delà des trois portes
par nécessité, on dirait
nos histoires rejouées par un fleuve et ses langues "**
Lire Denise Desautels, c’est apprendre à ralentir le regard, à découvrir une écriture subtile, partagée entre la détresse, le désarroi que nous ne choisissons pas de vivre et l’utopie, l’idéal que nous pouvons décider de porter jusqu’à la lumière, auprès des autres.
La poésie comme un acte de résistance contre le silence assourdissant qui nous entoure.
" si nul musée, nul poème
à quoi bon les cahiers et les murs "***
(*) extrait de « Une improbable rédemption »
(**) et (***) extraits de « Quai Rimbaud »
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Ce désir toujours nous propose un abécédaire de création, de réflexion, qui nous permet aussi bien de rentrer dans la « chambre à soi » de la poète que dans celle de l'amoureuse. On retrouve le Fils comme la meilleure amie, trop tôt décédée (K.), le Père, la mère (Ô), l'amoureux (Gilles), mais aussi des réflexions sur l'écriture (Bibliothèque et Écrire particulièrement), sur le labyrinthe des miroirs intérieurs, sur la sculpture, le toucher, la réconciliation. L'objet pourrait s'avérer hétéroclite; pourtant, partout, on reconnaît le souffle unique de la poète, son regard si particulier sur le quotidien, sur l'abstraction du geste d'écriture.
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Comment dire le deuil d'une mère, évoquer à la fois la culpabilité, les incompréhensions, la difficulté de continuer à vivre aussi bien que de se souvenir? Denise Desautels y réussit admirablement avec son recueil Pendant la mort, tantôt chuchoté, tantôt prolongement d'une écorchure, les vers finissant par se muer en prose, journal d'un apprentissage, de la vie à travers la mort de celle qui a donné la vie, justement.
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