Derek Wood

Paru en 1962 sous le titre « La victoire de la RAF » cette traduction de « The narrow margin » fut rééditée en 1969 sous le titre « La bataille d’Angleterre » et reste aujourd’hui incontournable.



Le premier tiers de l’ouvrage étudie la période 1918/1939 et précise comment l’Allemagne prépara dès le 11 novembre 1918 la revanche grâce à des accords avec la Russie bolchevique qui mit à sa disposition des terrains d’entraînement et grâce à des accords économiques avec les pays scandinaves ou neutres qui la dotèrent d’une industrie aussi clandestine qu’innovante.

Derek Wood et Derek Dempster analysent ensuite la léthargie britannique des années 20 et le réveil des années 30 avec leurs conséquences sur l’organisation de la RAF, en tant qu’organisation indépendante de la Navy ou de l’armée de terre, puis les investissements dans des moteurs et des avions compétitifs. Ils détaillent le plan industriel qui dota le Royaume d’une industrie aéronautique puissante, agile et décentralisée chez de multiples sous traitants adossée aux groupes industriels experts en grandes séries (automobile).

Enfin ils présentent les moyens de renseignements à savoir le radar, d’une part, et « l’intelligence » (espionnage) d’autre part, qui leur ont procuré un net avantage concurrentiel sur la Luftwaffe.

Cette première partie est fort intéressante et interpelle quand on réfléchit à ce que fut l’impréparation de notre aviation sur le plan industriel et militaire lors des années 30 …



Vient ensuite la bataille aves ses cinq phases :

- du 10 juillet au 7 aout, la bataille de la Manche « Kanalkamp », en préparation d’un débarquement, très inefficace puis moins de 1% du tonnage britannique fut coulé.

- du 8 au 23 aout, la tentative de destruction de la RAF et de son industrie, symbolisée par le 13, baptisé Aldertag (jour de l’aigle) et le 15, « jeudi noir » où fut détruite la majeure partie de Luftflotte 5 basée en Norvège et au Danemark.

- du 24 aout au 6 septembre, à la suite d’un largage accidentel sur Londres, Churchill décida de bombarder Berlin dans la nuit du 25, ce qui brisa la réputation de Goering et incita Hitler à bombarder les villes … sauvant ainsi les aéroports et les radars … et donc la RAF.

- du 7 au 30 septembre, le Blitz, avec les bombardements de Londres et des grandes villes qui permirent à la RAF de se reconstituer et d’infliger des pertes croissantes aux allemands ; le 15 septembre reste dans l’histoire le « Battle of Britain Day » avec un score probable 28/56

- du 1 au 30 octobre, la bataille d’usure s’amenuisa progressivement



L’ouvrage réhabilite le Général Dowding et sa stratégie prudente qui a permis de tenir le choc et de donner du temps au temps, notamment pour former de nouveaux pilotes. Le 3 aout 1940 l’Angleterre avait 708 chasseurs et 1434 pilotes ; le 31 mars 1941 elle disposait de 1240 chasseurs et 1702 pilotes.



La victoire de la RAF marqua le premier échec de l’Allemagne. Le 18 juin 1940, Churchill avait prédit : « Je crois que la bataille d’Angleterre est sur le point de commencer. La survie de la civilisation chrétienne dépend de l’issue de cette bataille. Notre manière de vivre britannique, de même que le maintien de nos institutions et de notre Empire reposent sur cette civilisation. L’ennemi sera bientôt forcé de lancer contre nous toute sa furie et sa puissance. Hitler sait qu’il devra nous anéantir sur notre île s’il veut remporter la victoire. Nous devons par conséquent rassembler nos forces et accomplir notre devoir, nous comporter de telle manière que si l’Empire britannique et son Commonwealth existent toujours dans mille ans, les hommes pourront dire : « Ce fut leur heure de gloire». »