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Citation de mandarine43


[ Incipit ]

Il roule au mois d’août sur une nationale vide, à bord d’une ancienne épave repeinte qui peut faire illusion. Pour tout bagage, il emporte une trousse de sinistré Air France, avec sa mousse à raser durcie, son chocolat momifié, et l’addition à demi effacée d’un bar devenu depuis la succursale d’une banque.
La voiture est une vieille anglaise, endormante, un monde clos, décalé, dépassé qui s’efforce encore de tenir la route. Il fait trente degrés à l’extérieur, et la climatisation « d’époque » lui pleut sur les chaussettes. Il s’arrêtera dans un magasin avant la frontière ; les élans du cœur vont mal avec les pieds mouillés. Il roule vers un souvenir d’amour, un rendez-vous, peut-être un piège, sans doute une désillusion, mais il n’a eu ni le courage, ni la lâcheté, ni la désinvolture d’ignorer l’appel. Il a reçu une carte postale, deux heures plus tôt. Vingt ans plus tard. Leur histoire se résume à un coup de foudre et deux anniversaires.
Avant de prendre le volant, tout en faisant chauffer le moteur, il a fait le compte de leur vie commune. Il est arrivé, en gros, à vingt quatre heures. La première fois, c’est lui qui est parti, la deuxième fois c’est elle, la troisième ils se sont séparés d’un accord tacite ; on peut dire, d’une certaine manière qu’ils sont quittes. Il ne se demande presque pas si elle sera au rendez-vous. Elle ne sait d’ailleurs pas qu’il va venir.
Cet homme qui roule vers un passé mal éteint n’a plus guère de ressemblance avec celui que j’étais ce matin - l’anxieux, le débordé, l’impatient a laissé la place au rêveur de jadis, au timide qui se cachait sous des audaces trompeuses. J’ai trois cents kilomètres devant moi pour refaire connaissance.
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