Ilya laissa ses yeux errer dans le vague, pour esquiver ceux des uniformes gris, pour ne pas en subir l’attrait magnétique. Il ne pensa à rien, pour n’émettre aucune odeur.
— Jeune homme !
Il se figea aussitôt, docile. Comment l’avait-on reconnu ? À la teinte de sa peau ? Son dos courbé ? Sa tête baissée ? Ou était-ce l’instinct du chien de chasse qui reconnaît sa proie ?
— Approchez ! Vos papiers !
Il tendit son passeport. On compulsa les dernières pages tamponnées. On fit claquer la langue.
— D’où revenez-vous ?
Mentir ou dire la vérité ? On n’allait tout de même pas vérifier ses dires. Il était parti… quelque part. Se reposer. Chez sa grand-mère. En voyage d’affaires. Comment pourraient-ils le vérifier ?
— J’ai… purgé une peine.
— L’attestation de remise en liberté.
Il la lui tendit. Le lieutenant lui tourna le dos, marmonna quelques mots dans sa radio et écouta ce qu’on lui marmonna en retour ; Ilya, toujours immobile, ne soufflait mot. Il était réglo. Il avait purgé toute la durée de sa peine, la libération anticipée lui ayant été refusée.