Ce qui me semble caractéristique des artistes portant un regard sur la bataille, c’est l’impression laissée par la puissance de feu mise en action. Pour les artistes de l’époque, qu’ils y portent un regard d’esthète ou un regard horrifié, il y a là incontestablement un nouveau sublime, celui de la puissance industrielle qui outrepasse infiniment la mesure humaine. Le champ de patates devenu champ bataille, c’est le passage de la lente créativité de la nature à la puissance explosive de l’industrie. On a changé de vitesse, on a changé de puissance, on a changé d’époque, et cela par une guerre mondiale.
Guillaume de Vaulx, philosophe.
Les sanglots lents
Des percutants
Ennemis
Bercent mon coeur
D’une langueur
Et d’ennui
Sanguinolent
Quand en sifflant
Frapp’ l’obus
Je me souviens
De jours anciens
Où je bus
Et je tombe : où ?
Dans le grand trou
Qui m’enferme
Et m’a couvert
De brins verts
Et de brume.
Poilu du secteur de Vaux à la manière de “chanson d’automne” de Paul Verlaine.
L'aluminium est une matière première commune sur le front, présente notamment dans les fusées d’obus. Malléable, peu oxydable et se moulant aisément, le soldat peut dessertir la partie en aluminium, la fondre dans un creuset improvisé, puis couler le métal en fusion dans un moule prédéfini. Celui-ci est ensuite gravé et incisé.
“C’était ein pauv’ bougre d’Poélu, qui s’en allait sous la mitraille…
Vantié ben qu’i n’aurait voulu être en aut’ part qu’en la bataille.”
Marc Leclerc écrit en dialecte angevin.
La réunion de ces œuvres au Mémorial de Verdun et dans cet ouvrage est un retour à la source de leur inspiration, après un siècle, fragile revanche de l’acte créateur sur le chaos et ferment d’espoir, elle montre que l’art peut aussi être une façon de dépasser l'anéantissement.