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Citation de enkidu_


Je voudrais, en terminant, et afin d'éviter les malentendus, indiquer que la phénoménologie, comme nous l'avons développée plus haut, n'élimine que la métaphysique naïve, opérant avec les absurdes choses en soi, mais qu'elle n'exclut pas la métaphysique en général. Elle ne fait pas violence aux motifs et aux problèmes qui animaient intérieurement la tradition ancienne. C'était sa méthode et sa position des problèmes qui étaient absurdes, non point ses problèmes et les motifs de leur position.

La phénoménologie ne dit pas qu'elle s'arrête devant « les dernières questions les plus hautes ». « L'être, premier en soi », qui sert de fondement à tout ce qu'il y a d'objectif dans le monde, c'est l'intersubjectivité transcendantale, la totalité des monades qui s'unissent dans des formes différentes de communauté et de communion. Mais, à l'intérieur de toute sphère monadique effective, et, à titre de possibilité idéale, à l'intérieur de la sphère monadique imaginable, réapparaissent tous les problèmes de la réalité contingente, de la mort, du destin, le problème de la possibilité d'une vie « authentiquement » humaine et ayant un « sens » dans l'acception la plus forte de ce terme et, parmi ces problèmes, ceux du « sens » de l'histoire et ainsi de suite, en remontant toujours plus haut.

Nous pouvons dire que ce sont là les problèmes éthiques et religieux, mais posés su un terrain où doit être posée toute question qui peut avoir un sens possible pour nous.

C'est ainsi que se se réalise l'idée d'une philosophie universelle tout autrement que ne se la représentaient Descartes et son temps, qui furent seduits par l'idée de la science moderne. Elle ne se réalise pas sous la forme d'un système universel de théorie déductive, comme si tout ce qui existe était englobé dans l'unité d'un calcul. Le sens essentiel et fondamental de la science s'est radicalement transformé. Nous avons devant nous un système de disciplines phénoménologiques, et dont la base fondamentale n'est pas l'axiome ego cogito, mais une pleine, entière et universelle prise de conscience de soi-même.

En d'autres termes, la voie qui mène à une connaissance des fondements derniers, au plus haut sens du terme, c'est-à-dire à une science philosophique, est la voie vers une prise de conscience universelle de soi-même, monadique d'abord et intermonadique ensuite. Nous pouvons dire également que la philosophie elle-même est un développement radical et universel des méditations cartésiennes, c'est-à-dire d'une connaissance universelle de soi-même, et embrasse toute science authentique, responsable d'elle-même.

L'oracle delphique γνῶθι σεαυτόν [connais-toi toi-même] a acquis un sens nouveau. La science positive est une science de l'être qui s'est perdue dans le monde. Il faut d'abord perdre le monde par l'ἐποχή [épochè], pour le retrouver ensuite dans une prise de conscience universelle de soi-même. Noli foras ire, dit saint Augustin, in te redi, in interiore homine habitat veritas [Ne vas pas au-dehors. Ne te disperse pas à l'extérieur. Rentre en toi-même. C'est en l'homme intérieur qu'habite la vérité]. (pp. 133-134)
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