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Citation de fanfan50


Mon rêve américain se résume surtout à des jambes : on voit, comme dans une séance de cinéma de dix secondes, les jambes nues d'un homme et d'une femme marchant côte à côte ou légèrement décalés, en tout cas assez vite, les quatre pieds nus frappant le sol. Les deux personnages de mon rêve se nomment Charlotte et Wilbourne, ce sont les personnages des Palmiers sauvages de William Faulkner. J'ai commencé à faire ce rêve aussitôt après avoir lu le livre, il y a des années. Le reste du livre de Faulkner est passé en mode basse résolution, je n'en ai qu'un souvenir assez flou. Seule est restée intacte cette scène minuscule du milieu du livre, dans une maison isolée, en pleine nature américaine.
A ce moment du livre Charlotte et Wilbourne viennent de passer les mois d'été totalement coupés du monde dans cette maison prêtée par un ami. Comme Charlotte est mariée à un autre homme, leur histoire d'amour illégitime a valu à Wilbourne de perdre son emploi de médecin. La solitude ne les gêne pas, au contraire. Pour bien saisir l'atmosphère du rêve, il faut se représenter que la maison dans laquelle passent les jambes est située auprès d'un lac ; il faut prendre la mesure de l'épaisseur verte et silencieuse de la nature. Le séjour au bord du lac est une expérience d'amour adamique isolé dans la nature, sans rapport avec la société, sans rapport avec d'éventuels voisins tondant la pelouse qui feraient un petit coucou par-dessus la haie. Charlotte et Wilbourne ne veulent pas être des voisins, ni un couple respectable ; ils ne veulent pas être un mari, ni une épouse ; la respectabilité est pour eux le repoussoir, la figure du désastre bourgeois. On ne sait pas trop s'il y a du bonheur dans cette vie composée uniquement d'amour, sommeil et baignades, parce que les corps et les esprits sont rugueux, d'une brutalité solide qu'il est bizarre même d'appeler amour. Il y a en tout cas une forme d'intransigeance simple : n'être régi par aucune contrainte extérieure, être ensemble chaque jour, coucher ensemble chaque nuit, n'être soumis à aucune des obligations, aucun des rythmes du monde social.
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