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Citation de enkidu_


27. La lumière n’est pas en concurrence avec les couleurs : plus elle se lève et plus les couleurs brillent. L’océan n’est pas en concurrence avec les poissons : plus il s’étend et plus les poissons se multiplient. La sève n’est pas en concurrence avec l’arbre : qu’il s’en laisse pénétrer davantage, et sa ramure s’étend, verdoie, fructifie. L’inhabitation divine n’est pas la possession démoniaque. Celle-ci aliène et stérilise. La première recueille et féconde.

La transcendance de Dieu ne s’oppose pas à son immanence ; elle la garantit. C’est parce que le Créateur est infiniment différent des créatures, qu’il n’est pas en rivalité avec elles, et peut leur être infiniment présent sans diminuer leur présence, mais en la leur donnant. C’est parce qu’il les transcende qu’il peut être en elles sans les obstruer, mais en dégageant leur liberté plus grande ; agir sur elles sans les rendre passives, mais en intensifiant leur activité ; les aspirer à lui sans les absorber, mais en les confirmant dans leur singularité propre.

Parler de Dieu ne saurait donc être comme une chape de plomb qu’on coule. C’est d’abord une aube qui se lève. Une telle parole est une clairière. Elle doit permettre de parler à la fois de Dieu et d’une fille, à la fois de l’Éternel et d’un joueur du Milan AC. Et je ne rigole pas. C’est là le Jugement dernier. Que nous enseigne le discours du Christ sur ce Jugement ? Si vous l’avez fait à l’un de ces petits, c’est à moi que vous l’avez fait… et si vous ne l’avez pas fait à l’un de ces petits, c’est à moi que vous ne l’avez pas fait (Mt 25, 31-46). Dieu n’est pas cette Super-Créature devant laquelle s’éclipsent même les grands. Il est ce Créateur qui fait place même aux plus petits, qui va jusqu’à s’identifier à eux, puisqu’il ne cesse de leur donner l’être et de vouloir leur communiquer sa joie.

Voilà l’ineffable : il loge sous les mots de tous les jours. Il n’est pas retranché dans l’Olympe : il est ici, partout, au milieu d’un hospice, dans un jardin d’enfants, sous un hall de gare, aux toilettes publiques, effacé comme la lumière qui donne à voir toutes choses. Nous ne pouvons pas en parler comme d’une chose à côté des choses, mais nous ne pouvons pas non plus parler vraiment des choses en le taisant, car il est leur principe et leur fin. Porter son Nom n’est pas l’asséner d’en haut, mais plutôt le laisser remonter à partir du fond de toute réalité. Si bien que la question « Comment parler de Dieu » nous renvoie moins à la question d’un sujet de conversation plus relevé que les autres, qu’à la question d’une modalité de la parole absolument hospitalière.
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