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Citations de Fabrice Hadjadj (160)


Un type qui achète des tonnes de soja, sans en rien manger, sans les avoir jamais vues, sans les faire acheminer vers ceux qui ont faim, mais, à travers une commande électronique, pour les revendre en faisant un gros bénéfice, un tel type n'est-il pas déjà mort, dans son rapport à la réalité ?
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Les effets de la "civilisation technologique" sont si démesurés, si "globaux", qu'on ne peut plus se contenter de se retirer dans son jardin pour revivre. L'île déserte est déjà recouverte de prospectus et de déchets toxiques. Aussi l'engagement est-il forcé d'avoir une dimension politique et internationale.
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Cette incorporation de l'humanité au Verbe fait chair, qui s'exprime par la relation des membres à la tête, se manifeste aussi par l'union de l'homme et de la femme. Le premier miracle du Christ - l'eau changée en vin- s'accomplit durant les noces de Cana. La décollation de Jean-Baptiste, le précurseur, est consécutive à son témoignage pour le mariage indissoluble : Il ne t'est pas permis d'avoir la femme de ton frère, dit-il à Hérode provoquant la rage d'Hérodiade ( Mc 6, 18). La venue du Messie et l'union des sexes paraissent échanger leurs alliances. Le très charnel Saint-Paul l'explicite dans cet éblouissant passage de sa lettre aux Ephésiens : Nul n'a jamais haï sa propre chair; on la nourrit au contraire et on prend bien soin. C'est justement ce que le Christ fait pour l'Eglise : ne sommes-nous pas les membres de son Corps? Voici donc que l'homme quittera son père et sa mère pour s'attacher à sa femme, et les deux ne feront qu'une seule chair : ce mystère est grand, je le dis à propos du Christ et de l'Eglise ( Eph5, 29-32). Paul passe sans transition du Corps mystique à l'union nuptiale. N'être qu'un seul corps, faire une seule chair, les deux se rejoignent. La théologie découvre l'érotique suprême. On pourrait presque parler de divine pornographie. Par l'incarnation, le Verbe nous rentre dedans.
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Quel salut est-ce qu’on pourrait bien prêcher ?
Au fond, ce que je voudrais, un jour, c’est d’entrer sur scène et de pouvoir juste dire : « Bonjour les petits enfants », sans hypocrisie, sans aucun mensonge…
Le mensonge n’est pas dans le fait que je vous appellerais « petits enfants ». Petits enfants, nous le sommes, même avec une prothèse de hanche, même avec un prix Nobel de physique, petits enfants devant toutes ces choses qui nous dépassent, devant même un seul grain de poussière qui contient plus d’énigmes que n’en peut résoudre toute la philosophie… Le mensonge, ça serait plutôt dans le fait de dire : « Bonjour ».
Pourquoi donc, depuis le temps qu’on meurt, pourquoi donc est-ce qu’on s’obstine à se redire « Bonjour »…
« Bonjour », est-ce que ça n’est pas une prière ça aussi ? Est-ce que ça n’est pas appeler sur nous un jour absolument bon ? Est-ce que ça n’est pas réclamer le Jour du Jugement où la bonté triomphe et les morts se relèvent ?

« Bonjour »… « Shalom »… j’entrerais comme ça sur scène, toutes portes closes, et je dirais seulement cette parole : « Bonjour les petits enfants », et nous serions guéris… ou encore je dirais « Shalom aleikhem », comme entre ces gens qui pouvaient partir en train pour partir en fumée dès le surlendemain, « Shalom aleikhem », même si les sales hommes sont les mêmes, « La paix soit avec vous », même si c’est la guerre partout, oui, voilà l’incroyable événement que j’imagine : un type entre, comme ça, toutes portes closes, et dit simplement la paix soit avec vous », et voilà que pour la première fois cette parole est complètement vraie, voilà que la paix descend dans nos cœurs comme la colombe se pose sur la branche pour y chanter sa chanson, oui, juste cela, j’entre sur le plateau, et avec une audace folle, avec une prétention exorbitante, avec une hardiesse surhumaine, je vous lance comme ça : « Bonjour », mais pour de vrai, pour de bon, que tout le jour tienne enfin sa promesse de bonté, qu’est-ce qu’il pourrait y avoir de plus fabuleux ?
Mais je dois vous dire au revoir, maintenant …
Au revoir !
Qu’est-ce que j’ai dit ?
« Au revoir », encore une prière qui se prie malgré moi, avec ma propre langue !... Comme si j’avais l’espérance de vous revoir encore, de vous revoir toujours, comme s’il était impossible qu’il n’y ait pas quelque part revoyure et retrouvailles…
Et si on ne devait se revoir jamais, qu’est-ce que je devrais dire ?
Adieu ?
Adieu ?
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Alors vous demandez : quel pouvoir lui a valu pareil surnom ? Allons, nous y arriverons bientôt. Sachez pour l'heure qu'il s'agissait d'un pouvoir étrange, double, tellement double qu'on pouvait aussi bien le prendre pour une espèce d'impuissance. On n'aurait su dire, au fond, qui s'était penché sur son berceau : Clochette ou Carabosse ? Peut-être les deux en même temps, en se cognant la tête.
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En tant qu'il nie l'existence de Dieu, ou la divinité de Jésus, l'athéisme n'est pas le pire refus de Dieu possible. Pascal y voit même, quand cet athéisme est une inquiétude et non un contentement, un état qu'il faut plaindre plutôt que blâmer : " Plaindre les athées qui cherchent, car ne sont-ils pas assez malheureux ? Invectiver contre ceux qui en font vanité."
L'athée qui cherche n'est pas satisfait de son athéisme. Il devine que cet athéisme, à devenir trop confortable, se changerait lui-même en un fétiche domestique. C'est qu'il n'est pas facile d'être athée pour de bon. On brise une idole, soit ! mais que ce ne soit pas aussitôt pour en construire une autre : l'argent, la volupté, l'art, la science ... Que ce ne soit pas non plus pour sacraliser ce geste du brisement : il y a un intégrisme de la transgression, et ses prêtres sont d'autant plus féroces qu'ils sont persuadés d'être les thuriféraires de l'absolue liberté.
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Fabrice Hadjadj
Nous croyons à tort que les mouvements islamistes sont des mouvements pré-Lumières, qui découvriront bientôt les splendeurs du consumérisme. En vérité, ce sont des mouvements post-Lumières. Ils savent que les utopies humanistes, qui s'étaient substituées à la foi religieuse, se sont effondrées.
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Fabrice Hadjadj
L'accumulation sans fin, de même que la dépense sans limites sont absurdes devant l'imminence de la mort, et si elles ne paraissent pas telles, c'est parce qu'elles ont pour but de fuir devant l'angoisse de mourir : l'argent, dans sa fonction de réserve, nous laisse imaginer que nous aurons toujours l'avenir qui permettra de le dépenser ; la consommation, dans sa fonction de divertissement, nous étourdit assez pour ne plus considérer notre fin.

(Le monde des religions).
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On se souvient des démons qui s'installent dans l'âme balayée et rangée. Sept plus un, huit, c'est le nombre des béatitudes. Satan étant " singe de Dieu", j'imagine la parodie :

Heureux les riches de leur propre esprit, les principautés de ce monde sont à eux.
Heureux les durs, ils posséderont la terre conquise.
Heureux ceux qui pleurent, pourvu qu'ils se disent que le méchant c'est toujours l'autre.
Heureux ceux qui ont faim et soif de leur propre justice, ils sauront toujours revendiquer.
Heureux les miséricordieux, ils pratiqueront l'euthanasie.
Heureux les coeurs qui se sentent purs, car ils verront le diable.
Heureux les pacifistes, ils signeront d'autres Munich.
Heureux ceux qui se targuent d'être persécutés en retour, les principautés de ce monde sont à eux.
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C'est beau à voir,
Les feuilles.
Chacune est différente,
Vous avez remarqué ?
Leur vert d'abord,
Toujours plus que du vert,
Puis le dessin unique des nervures
Comme des mains levées vers le soleil,
Des mains qui de leurs doigts retressent ses rayons
J'écoute leur murmure.
Laisse monter en moi cette odeur de la terre
Et qui n'est pas que de la terre,
Qui rappelle bien autre chose.
Le ciel, peut-être.
La sève qui se souvient du ciel et n'en finit pas de monter vers lui
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Faible est la puissance qui a besoin d'écraser les autres pour exister. Aussi la Toute-Puissance n'est pas pour écraser, mais élever; elle n'est pas pour abolir, mais pour accomplir.
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- Pour ma part, je pense que Barnoves a raison, dit Côme. Ce sont des sbires d’Altemore qui ont reçu ordre de se faire passer pour des partisans de Ragar.
- Qui sait ? dit Pacôme. Ça pourrait être aussi des partisans de Ragar qui se font passer pour des sbires d’Altemore qui essaient maladroitement de se faire passer pour des partisans de Ragar pour qu’Altemore porte le chapeau et de l’attaque et du mensonge… une ruse au carré, quoi…
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Le mariage est tout ensemble un contrat et plus qu'un contrat. Ayant pour fin excessive la communion des personnes et la naissance des enfants, il présente la propriété étrange de ne pouvoir être rompu sans une intime violence, quand même les deux parties voudraient se séparer à l'amiable. La communion que suppose le "je t'aime" interdit toute rupture : son terme, c'est l'autre, et non telle ou telle de ses qualités. Si j'avais dit seulement : "J'aime ton cul" ou "J'aime ta réussite", j'aurais pu me défausser dès lors que mon conjoint rencontre l'échec ou que ses fesses s'avachissent. Mais j'ai dit " je t'aime, toi", c'est à dire ta personne dans sa totalité successive, ce qu'elle est aujourd'hui, mais aussi ce qu'elle sera demain et que je ne sais pas encore. Il n'en va pas comme d'un contrat avec une entreprise que je puis résilier lorsque je suis déçu ou que l'objectif est atteint.
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« Aubain », ici, ne vient pas du latin albus, « blanc », qui donne son nom à l’« aube », mais probablement d’alibi natus, c’est-à-dire « né ailleurs, à l’étranger ». L’aubain est un alien, en quelque sorte. Quant à l’« aubaine », au féminin, elle renvoie à une particularité du droit successoral tel qu’il s’appliquait à l’aubain. En vertu du « droit d’aubaine », le souverain recueillait la succession de l’étranger non naturalisé qui mourait dans ses États. De là le sens figuré et familier du mot : un « avantage inattendu », un bel « héritage précédé d’aucun testament », qui nous tombe dessus comme cela, du fait de la mort chez nous d’un inconnu venu de loin.
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Dieu premier servi.
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"Les tentes des pillards sont en paix : pleine de securite pour ceux qui provoquent Dieu et pour celui qui met Dieu dans son poing! Interroge pourtant les bestiaux, ils t'instruiront ; les oiseaux du ciel, ils t'enseigneront. Cause avec la terre, elle t'apprendra ; et les poissons des mers te le raconteront." Job, 12, 6-8
Citation en exergue
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Un monde parfait où les petits viendraient sans turbulence, conformes à la notice du fabricant, serait pire qu'un hiver nucléaire. Les enfants seraient gelés dès le noyau de leur première cellule. Ils naîtraient vieux de toutes nos rancoeurs et tous nos soucis. Leur printemps ne pourraient plus percer la croûte de nos préoccupations. Nous aurions définitivement perdu l'esprit d'enfance…
Alors, il nous faut bien en arriver à cette conclusion qui voudrait interdire de clore et de conclure à la place de l'autre : plutôt qu'un surhomme conforme aux études marchandes du vieil homme, mieux vaut une petite Fleur, polichinelle jaillissant de la boîte, handicapée mentale, sans doute, douloureusement impuissante à entrer dans la maturité consciente, mais plus apte à nous tirer de notre triste horizon productiviste, plus douée pour nous rappeler la surprise d'être et la joie d'aimer.
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Or, si tout dépend d'une construction, le rapport suprême au monde n'est plus contemplatif : il relève de la technique. Il n'est plus question d'accueillir. Il s'agit de "faire" l'amour.
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Là-bas, le feu consumait sans brûler -- cendres d'aucune braise lumineuse ; ici, le feu brûle sans consumer -- présence du buisson ardent. Ce sont des séraphins, peut-être, certainement des vivants passés de l'autre côté de l'image. Ils nous préviennent qu'on brûle au paradis beaucoup plus qu'en enfer. "Je suis venu jeter un feu sur la terre, dit le Messie, et comme je voudrais qu'il soit déjà allumé !" (Lc 12,42). C'est à ce point, devant la fournaise de ces visages, que l'oeil achève sa course. Mais avec ce rideau la question à nouveau se pose : accepteras-tu d'être brûlé par la grâce ? Feras-tu voie à cette flamme qui dans tes veines cherche son chant ?
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Le grand bluff, dans nos chrétientés déchristianisées, consiste à récupérer la compassion pour la retourner contre le Christ. Compassion de la tripe sensible contre celle du coeur ardent : elle aurait consisté à faire avorter Marie, pour lui éviter à la fois la répudiation et ce fils voué au supplice monstrueux, et, s'il était trop tard pour cette sollicitude, à donner du moins à Jésus non pas le vinaigre sur la Golgotha, mais un cocktail lytique à Gethsémani. Les chrétiens sociaux craignent de passer pour tortionnaires, si bien qu'ils finissent par céder à la gentillesse létale. Mais les "cathos-tradis", en face, se font aussi avoir à ce jeu de la compassion : que tout se résume à la lutte contre l'avortement, et qu'on oublie d'annoncer la Grâce qui sauve le misérable ( spécialement l'avorteur), voilà qui réjouit infiniment l'Enfer.
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