En 1952, pour la première fois, un Noir a dansé avec une Mundele, une Blanche. C’était le mariage de la fille de mon patron, un soir à Port-Francqui, aujourd’hui Ilibo. J’ai eu le courage de demander à une dame européenne de danser avec moi. Et ça, on n’avait jamais vu à l’époque !
Mathieu Kuka , employé à l’époque, décrit - en souriant de son inconstance d’alors - c’est qu’était pour lui l’indépendance.
C’était, en quelque sorte, une libération. Les Belges vont nous lâcher la main et nous allons conduire nos affaires et notre pays à notre manière.
Pour moi, l’indépendance, a l’âge que j’avais, cela signifiait : je suis libre maintenant, je ne paierai plus d’impôts, je peux aller dans un magasin, je peux faire un bon, et je paierai le jour que je veux ! Je veux un poste de radio, je vous dit : « Bon, je n’ai pas l’argent maintenant, je paie à la fin du mois ou je paie dans trois mois.” Et vous êtes obligé de me donner ce poste de radio ! C’est à dire que je vis … á crédit !
La période coloniale est curieusement mieux assumée au Congo qu’en Belgique. Les Congolais la considèrent en général sereinement, en souhaitant parfois le “retour des Belges” : “ Il y avait les injures et l’injustice du système, mais le pays fonctionnait, et les gens mangeaient à leur faim”. Il est vrai que la suite n’a guère été heureuse…
La conception que nous avions du Blanc, au Congo, à l’époque, c’est que l’homme blanc, c’est le riche, et qu’il n’y a pas de Blancs pauvres ! On ne concevait pas qu’un Blanc puisse être pauvre comme les Congolais. On avait l’impression que tout Blanc est riche et qu’il a tout. Alors, quand on arrive en Belgique, voilà encore une impression forte, à l’époque, on voit que les Blancs, ce sont des hommes comme tout le monde. Il y a des riches, il y a des pauvres, il y a des travailleurs, il y a un peu de tout.
Le plus fort, c’était de voir que les Belges de Belgique condamnaient le comportement de discrimination qu’ils observaient chez les Belges du Congo. Là, c’était vraiment net, c’était catégorique !