François Thiéry

Graal rarement accessible, le crime parfait doit respecter trois règles, inamovibles : une victime (proche du meurtrier, de préférence), un mobile (qui entraîne la préméditation, nécessairement) et un artiste (toujours coupable, forcément). Parmi ces trois constantes, une seule ne doit jamais être con-nue du public sinon de la justice : l’identité du meurtrier ou, du moins, la preuve de sa culpabilité. Le mobile est indispensable, aussi dérisoire soit-il, ce qui exclut les tueurs en série qui choisissent leur proie au hasard et qui ne sont mûs que par de bas instincts. Certains auteurs considèrent que, puisque les meurtres en série sont aléatoires et imprévisibles, ils devraient plutôt être classés dans la catégorie accident.
Assis sur le tabouret de la salle de bain, Fabrice Levide referma De l’assassinat considéré comme un des beaux-arts. Il avait rarement lu un livre aussi vite. De fait, il l’avait survolé car les chapitres ne tenaient pas les promesses du titre.
— De Quincey a eu le mérite de lancer le débat sur le fond, songea Fabrice en s’essuyant les doigts de pied, mais il n’a jamais mis ses propres idées en pratique. La qualité d’un assassinat ne doit pas être fonction de la notoriété de la victime. C’est aussi ridicule qu’un meurtre sans mobile.