Françoise Lesveyriès

Elle l'avait aimé de façon brutale, sans réfléchir, et ils avaient passé de bons moments ensemble. Non, mieux que ça. Ils avaient vécu une histoire d'amour physique plus qu'intellectuelle. Ils avaient été heureux, tous les deux, pendant plusieurs semaines. Et même si elle ne voulait pas poursuivre cette histoire, elle ne pouvait nier la relation intense qui avait été la leur.

...Et cette jeune femme que vous voyez là, profondément blessée, angoissée à l'idée de retourner dans sa cellule misérable, et qui pourtant trouve au plus profond d'elle-même le courage de rester digne, cette jeune femme-là, monsieur le Président, est dotée d'une force immense. Et d'où lui vient cette force ? De son honnêteté, car elle n'a jamais trempé dans cette affaire de détournement. De son amour, car elle a préféré risquer sa liberté, que dis-je, sa vie ! pour sauver l'homme dont elle était amoureuse...

Beaucoup de choses avaient disparu. La confiance, la décontraction, le rire, la tendresse... Finie la belle insouciance affichée ces dernières semaines. Finis les mots d'amour qui l'avaient tant émue à Genève. Même leurs nuits n'étaient plus les mêmes... Alors, que restait-il ?
Il restait un roman difficile à finir, un amant souvent de mauvaise humeur et une envie de partir qui devenait de plus en plus pressante.

Elle n'aimait pas le gris confortable, gage d'ancienneté et de richesse, des immeubles de pierre. Elle n'aimait pas non plus l'allure «dandy» des employés de banque qui les croisaient sans cesse, tous habillés sur le même modèle bleu-marine-et-blanc, cravate comprise.

Vivons l'instant présent, au jour le jour. Profitons de la chance d'être dans un tel lieu avec un amant merveilleux et amoureux. Il sera toujours temps de m'inquiéter quand surgiront les premiers problèmes !

Ce n'est pas possible, elle m'intimide ! Il faut quand même être idiot pour se laisser impressionner par la première jolie femme venue, même si elle a l'air de sortir d'un magazine de mode...

Je comprends ce que voulait dire Lamartine quand il a écrit « Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé ». Depuis, la vie me paraît terne, insipide, inutile même parfois...

Plus rien ne compte que nous deux... Et, même si de temps en temps nous pensons à ce qui nous est arrivé, ça ne servira qu'à renforcer notre amour.

Ils se dirigèrent, main dans la main, vers le lit dans lequel ils étaient prêts à réinventer leur amour.