Frieda Fordham

Le problème de la seconde moitié de la vie est de trouver un nouveau sens et un but, et assez curieusement, c'est dans l'aspect négligé, inférieur et mal développé de la personnalité qu'on le trouve le plus surement. Beaucoup de gens, cependant, ne peuvent envisager une telle possibilité, préfèrent se cramponner aux valeurs de leur jeunesse, et les poursuivent même d'une façon excessive ; pour eux, le concept d'individuation ne peut avoir de sens.

L'homme total est un individu, mais n'est pas un individualiste, c'est-à-dire un égocentrique. Etre un individu ne saurait être un prétexte pour développer des particularités aux dépens des autres, ou pour se comporter égoïstement.

L'homme n'est pas une machine pouvant s'adapter continuellement et sans broncher à son environnement ; il doit aussi être en accord avec lui-même, c'est-à-dire s'adapter à son propre monde intérieur.

Tenter de définir l'inconscient collectif, c'est tenter l'impossible, car on ne peut connaitre ni ses limites ni sa véritable nature ; tout ce que l'on peut faire, c'est observer ses manifestations, les décrire, et essayer de les comprendre, dans la mesure du possible, et une grande partie de l'œuvre de Jung est consacrée à cette tâche.

Dire qu'une idée est subjective est souvent péjoratif. Mais c'est oublier qu'aucune pensée n'est possible sans un sujet qui la pense et qui la formule.

Le Soi est la fonction qui unit et transforme tous les éléments opposés chez l'homme et la femme, qu'il s'agisse du conscient et de l'inconscient, du bien et du mal, du mâle et de la femelle, etc. Il faut, pour l'atteindre, accepter ce qui, dans notre nature, est inférieur, mais aussi irrationnel et chaotique.

Jung a considéré le fait de devenir une totalité, c'est-à-dire conscient de l'inconscient, comme le concept central de sa psychologie, et a nommé cela processus d'individuation.

Quand il traite de la psychothérapie, Jung souligne toujours le fait qu'elle repose sur la relation entre deux êtres humains ; voilà l'élément important face auquel toutes les théories et les méthodes devraient être secondaires. Parfois, l'analyste ne peux s'empêcher de penser que ceci, cela, ou que l'autre solution serait meilleure pour le patient, mais il n'a pas le droit d'imposer ses vues ; son travail est de guider son patient jusqu'au point où celui-ci peut découvrir une façon de vivre et l'impulsion nécessaire pour la mettre en pratique. Les théories et les méthodes ne sont que des aides pour parvenir à cette fin.

Pour connaitre l'inconscient, il faut en faire l'expérience ; il n'est plus alors inconscient au sens strict du terme, mais étrange, violent, chaotique, se présente sous forme d'idées apparemment dénuées de sens, de fantasmes, de rêves et de visions pouvant apparaitre de temps en temps, ou fondre sur une personne comme un déluge.

Mais dans un grand rassemblement, quel qu'il soit, ce ne sont pas les qualités spécifiques des individus qui comptent – celles-ci ne servent qu'à les différencier, et non pas à les unir – mais plutôt ce qui leur est commun, c'est-à-dire les archétypes. Quand le même archétype est actif chez un certain nombre de gens, il les rassemble, comme par une force magnétique, et les pousse à agir d'une façon irrationnelle. En somme, pour préserver sa vie, un groupe doit mettre l'accent sur chacun de ses membres pour que les différences deviennent un désavantage et que les qualités moyennes soient cultivées. Donc, plus le groupe est grand, plus il a de chances de devenir stupide ; même un rassemblement de personnes hautement intelligentes se conduit selon un niveau d'intelligence beaucoup plus bas que ses membres individuels, et comme Jung l'a dit une fois avec amertume, cent têtes intelligentes ajoutées les unes aux autres donnent un hydrocéphale.

Civiliser l'être humain mène à un compromis entre l'homme et la société, entre ce qu'il semblerait qu'il soit et la composition du masque derrière lequel vivent la plupart des gens. Jung nomme ce masque persona, nom donné aux masques portés autrefois par les acteurs de l'Antiquité pour désigner le rôle qu'ils jouaient. Mais les acteurs ne sont pas les seuls à jouer un rôle ; un homme qui traite une affaire ou exerce une profession, une femme qui se marie ou choisit une carrière, tous adoptent dans une certaine mesure les caractéristiques que l'on attend d'eux dans leur position particulière, et il le faut pour réussir.

Il est maintenant facile de voir avec le recul que la préoccupation majeure de Freud fut la structure du caractère névrotique, et que l'intérêt profond de Jung allait aux psychoses, ou aux tendances psychotiques chez des sujets par ailleurs normaux. Elles représentent les éléments les plus archaïques dans la psyché et, dans les maladies mentales, submergent les modes de pensée et de comportement plus conscients, mais plus tardifs ; elles peuvent aussi être source d'énergie créatrice, comme Jung devait le montrer.

L'ombre apparaît dans les rêves comme une personne inférieure ou très primitive, avec des caractéristiques déplaisantes, ou comme une personne que nous n'aimons pas.
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Il est dans la nature des choses qu'il y ait la lumière et l'obscurité, le soleil et l'ombre. L'ombre est inévitable, et sans elle, l'homme est incomplet. La superstition prétend que l'homme sans ombre (au sens courant du terme) est le diable en personne, et nous-mêmes nous nous méfions d'une personne "trop polie pour être honnête", comme si nous reconnaissions instinctivement que la nature humaine a besoin du levain d'une légère méchanceté.
... Dans son optique (Jung) l'homme doit trouver une façon de vivre avec son aspect sombre ; en fait, sa santé mentale et physique en dépend souvent.