AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de enkidu_


J’aime l’Islam. Je m’y sens chez moi. Je suis l’Arabe voluptueux, tener Arabs, de Tibulle. Civilisation de la paresse, de la prière et du plaisir, l’Islam est, dans notre monde mécanique, le dernier îlot ou plutôt – car je sais des paradis qui ne sont point mahométans – l’un des derniers îlots où je puisse vivre selon le rythme et le mode qui sont pour moi le souverain bien.

La manifeste inaptitude des Arabes à utiliser les techniques de la modernité, loin de m’être une occasion de mépris, m’est une raison de les aimer davantage. Ne sachant pas conduire une automobile, je ne suis pas de ceux qui ricanent des Arabes à cause qu’ils ne sont pas propres à manier les chars et les avions : la noblesse d’un peuple ne se mesure pas à son habileté au napalm.

On me dit : « Est-ce la gueuserie de ces populations que vous considérez comme l’exemplaire que nous devons imiter ? » La question est mal posée. Il ne s’agit pas de condamner le « niveau de vie » que l’Occident apporte dans ses bagages, mais de considérer que ce « niveau de vie » n’est qu’une coquille vide s’il n’est pas nourri, habité, par le sens de la vie. Le pain que nous demandons à Dieu dans la prière dominicale est ensemble pain matériel et pain spirituel, pain de la terre et pain céleste. Les techniques ne sont rien si elles ne sont pas porteuses d’une grande idée, et je ne sache pas que la société européenne d’aujourd’hui, fondée sur la machine et l’agnosticisme, soit porteuse de quoi que ce soit qui ressemble à une grande idée : l’indigence matérielle de l’Orient se trouve face à face avec le sous-développement spirituel de l’Occident. L’aide des pays riches aux pays pauvres ? J’y applaudis, mais en marquant que la réciproque est vraie, elle aussi, et que les nantis ont beaucoup à recevoir des déshérités, et dans un ordre infiniment plus relevé que celui où ils leur donnent. Il y a une autre richesse et une autre pauvreté que la richesse et la pauvreté selon le monde.

Il est étrange que ce soit dans la patrie du père de Foucauld qu’il faille rappeler d’aussi premières vérités. N’aurions-nous plus la force de maintenir les brûlantes générosités de l’Évangile, non plus que de nous accorder au dépouillement hautain d’Épicure et des stoïques ? Hélas ! la France est saisie dans le tourbillon brutal où l’Occident abandonne son patrimoine spirituel et, partant, n’a rien à transmettre aux peuples qu’il subjugue, selon un joug économique souvent plus funeste aux âmes que le politique. (IX)
Commenter  J’apprécie          00









{* *}