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Citations de Gabriel Matzneff (127)


Lettre à Tristan

Avec une indifférence digne de l'antique, vous avez échoué à votre bachot. Ce n'est pas une tragédie : vous avez seize ans, toutes vos dents et l'avenir devant vous. (...) L'important n'est pas d'être un intellectuel, mais d'être intelligent. Soyez un intelligent, Tristan, c'est à dire un esprit délié, indépendant, apte à réfléchir par lui-même, à comprendre, à refuser, à s'enthousiasmer, à aimer.
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Ces impressions furent d'abord moins vives.En voyage, la première heure n'est pas l'heure du recueillement.
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Depuis mon adolescence, je demande à la philosophie d'être pour moi une école de bonheur, un eudémonisme. Je n'ai jamais eu le goût de la connaissance spéculative, et je ne lis les maîtres qu'afin d'y toruver des leçons que je puisse appliquer dans ma vie de tous les jours. J'attends de la philosophie qu'elle soit semblable au népenthès, cette substance qu'Hélène (la belle Hélène de Homère et d'Offenbach) rapporta d'Asie et qui, mêlée au vin, chasse la tristesse. Si elle est inapte à me délivrer de mes angoisses, à me cuirasser contre les chagrins, la sagesse n'est qu'une imposture ou, du moins, une jonglerie avec le réel, et cela ne m'intéresse pas. Je ne suis pas un philosophe universitaire, je suis un amateur, un dilettante, et seule est capable de me charmer une sagesse telle que la définit Sénèque, dans la XX° de ses "Lettres à Lucilius" : "La philosophie enseigne à agir, non à parler", facere docet philosophia, non dicere.
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Les deux êtres les plus sensuels, les plus doués au lit que j’aie connus de ma vie sont un garçon de douze ans et une fille de quinze. Cette fille de quinze ans, jamais personne ne m’a donné autant de plaisir, jamais je n’ai eu d’élève aussi douée. Au début, elle ne savait rien, mais son innocence n’avait d’égale que sa curiosité, et cet amalgame d’ingénuité et de complaisance était d’un voluptueux infini. Très vite, elle fut une amante fantastique, se livrant à des caresses, se prêtant à des postures que jusqu’alors nulle ne m’avait prodiguées, auxquelles nulle ne s’était abandonnée. Une femme de vingt-cinq ans a ses pudeurs, ses répugnances, ses habitudes. Une adolescente, tout lui semble naturel, car tout lui est nouveau.
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incipit :
1er janvier. La comète qui fait son vol dans le ciel me captive moins que le coeur de Francesca, lorsqu'il bat contre le mien.
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Nous voici déjà place Maubert ! Tout le monde descend. Rue Monge, votre narine palpite lorsque vous longez la brûlerie d’où, des sacs de jute, s’échappe une bonne odeur de café ; vous jetez un regard gourmand aux saucisses des Trois Petits Cochons. A l’angle de la rue des Bernardins, une dame encore alerte et quelques messieurs millésimés, genre anciens combattants, discutent debout autour d’un stand de presse improvisé. A peine sur le parvis, vous êtes enveloppée d’un tourbillon de scouts en uniforme, de bonnes sœurs qui vendent du miel, du pain d’épices, d’appétissantes tartes aux poires. Un jeune homme aux cheveux courts explique l’Europe de Maëstricht à une jolie fille bon chic bon genre, ragazza perbene
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Les politiciens parlent volontiers du redressement de la France, mais toute révolution sera vaine tant que le Pouvoir ne mettra pas fin à l'entreprise de crétinisation du peuple français, de décervelage de la nation qui tend à transformer nos compatriotes en un troupeau d'ilotes imbéciles. La vulgarité, la bêtise, la bassesse de la plupart des émissions dites « de variétés » sont la pierre de touche qui nous permet de juger un régime et, par-delà ce régime, une civilisation. A voir la France livrée aux chienneries des prétendus amuseurs de la télévision, on en vient à vomir une certaine forme de démocratie occidentale; on se sent devenir communiste ou fasciste, ce qui, hélas ! n'est pas une solution satisfaisante.
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Soyons des torches en feu.
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Le grand révélateur d’un être, ce n’est pas le devoir, c’est l’amour, et les maladroits sont souvent des gens à qui il n’a pas été donné de mettre la main à une œuvre qu’ils auraient aimée.
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incipit :
Il est, selon que je le sens, de bon augure que je m'envole vers l'Orient en cette quatrième semaine du Grand Carême où l'Eglise célèbre un des flambeaux du christianisme arabe, saint Jean Climaque, supérieur du monastère Sainte-Catherine du Sinaï, auteur de la fameuse Echelle, qu'a excellement traduite l'un de mes chers Messieurs de Port-Royal, Arnauld d'Andilly, et dont le thème cardinal est celui, brûlant, de la métanoïa, de la conversion. "Par le flot de tes larmes tu as fait fleurir le désert aride", chante le tropaire de la fête, qui s'applique avec une acuité singulière au conflit qui empourpre présentement le Proche-Orient.
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incipit :
Vendredi 1er janvier. Contre les souffrances de l'amour, le plus sûr remède est le mépris. Lorsqu'il n'y a plus ni confiance ni estime, la plaie se cicatrise avec promptitude.
(Noté en traversant la place Sant-Michel).
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Une des rencontres capitales que je fis, à dix-huit ans, chez M.Vrin, fut celle de Léon Chestov.Je me souviens de mon émotion quand, ouvrant au hasard un petit livre à la couverture grise intitulé " Apothéose du dépaysement ", j'y lus ces phrases cruelles et toniques, joyeuses et désespérées, qui soudain me parlaient de moi.Je venais de découvrir un nouveau compagnon de route.Je voulus lire tout Chestov.Je pus facilement acheter certains de ses livres.Pour d'autres (son " Kierkegaard", notamment) ce fût compliqué, et je dus attendre un an que M.Vrin réussisse à me procurer un exemplaire d'" Athènes et Jérusalem ", alors rarissime. Quelle allégresse quand, enfin! j'emporte ce volume serré sur mon cœur, tel un trésor !
C'est ainsi que s'accomplissent les vraies rencontres, loin du tumulte des
modes et de l'actualité minuscule, dans la quête et la ferveur.

( J.C.Lattès, 1994, p.14)
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Ce matin, j'ai été réveillé par Aude, puis appels successifs de Marie-Elisabeth, de Pascale. Poursuivi, coursé. Hier après-midi, pendant l'amour avec Marie-Agnès, j'ai débranché le téléphone. Débrancher le téléphone, quand je suis chez moi, c'est mon unique défense contre le harcèlement. Marie-Laurence a parlé d'Anne à Marie-Elisabeth. Celle-ci, furibarde, veut monter une expédition punitive contre le collège Sévigné. Elle me lance : - Ce n'est pas parce que personne ne vous résiste que vous devez vous croire irrésistible.
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Pour rentrer chez eux, ils passèrent par la plage. L'air était tiède : des nuages courant dans le ciel voilaient la lune. Très vite les deux hommes furent entourés d'enfants. Le tendre troupe les escorta en silence. Sous leurs pieds nus, des lueurs vertes s'allumaient : c'étaient des lucioles endormies dans le sable, et que leur marche transformait, magiquement, en un tapis d'émeraudes phosphorescentes.
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Un écrivain est dans la difficulté, et bien il faut regarder.
Pivot, Beigbeder et Tillinac se sont exprimés sur le sujet, leur prise de position est défendable et digne, leur indépendance d'esprit est intacte.

Par contre les gloussements de Raphaelle Bacqué sur la modique pension qu e perçoit Matzneff du ministère de la culture au titre d'écrivain en difficulté, ils sont 15, me paraissent déplacés. De quoi se mêle -t-elle ? Le Monde qui l'héberge n'est-il pas subventionné ? Là aussi il faut regarder, le journal est entre les mains de milliardaires français et étranger !
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La vérité est que, comme tous les Français d’aujourd’hui, tu es un jobard. J’écrirais volontiers un traité sur la jobardise du peuple français, toujours mené par le nez, toujours dupe et amoureux de ses dupeurs. Hier, quand l’Allemand bivouaquait dans nos villages, la France savait quelle était occupée. Aujourd’hui, l’ennemi nous occupe derechef, mais c’est un ennemi invisible, et qu’il ne faut pas nommer.
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Le déclin de l'Occident, avec quoi on nous casse les oreilles, ce n'est pas le pétrole, c'est l'avachissement.
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Vous êtes un esprit libre et vous vous étonnez d'être en butte aux persécutions de l'Etat ? Vous devriez pourtant, à votre âge, savoir que l'Etat, en qui Nietzsche voyait avec raison le plus froid des monstres froids, ne veut que des esclaves. Dans notre monde, qu'il soit capitaliste ou socialiste, l'indépendance d'esprit est le seul crime irrémissible. 
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Pour les meilleurs d’entre les Anciens, la distinction entre « nature » et « contre nature » ne veut rien dire. Il n’existe pas de cloison entre l’hétérosexualité et la pédérastie : un Horace, un Catulle draguent indifféremment les jeunes filles et les jeunes garçons imberbes. Dans Leucippé et Clitophon, roman d’amour d’Achille Tatius, on assiste à une discussion animée touchant les mérites respectifs des filles et des garçons : Ménélas préfère embrasser les petits garçons, dont les baisers, « s’ils n’ont pas la science des baisers féminins », n’en sont que plus savoureux, au lieu que Clitophon, lui, préfère les lèvres des jeunes filles, car « les baisers de la femme sont pleins d’art et elle rend son baiser aussi doux qu’elle le peut ». Il y en a comme ça plusieurs pages, mais à aucun moment Clitophon, l’amateur de filles, ne prétend que le goût qu’a Ménélas des petits garçons est « contre nature ». Pour lui, comme pour tout le monde antique, chaque goût est dans la nature, et le meilleur est celui qu’on a. L’auteur de Leucippé et Clitophon devait à la fin de sa vie se convertir au christianisme. Suidas précise même qu’il fut sacré évêque. J’espère que ses enfants de chœur étaient jolis.

De nos jours, en ce qui regarde les petites filles, merci, on s’en tire assez bien. La société française est, pour parler charabia, plutôt « permissive ». J’ai actuellement une merveilleuse maîtresse de quinze ans, et nos amours ne semblent choquer personne, il paraît même que nous formons un couple très chouette. Pour les garçons, c’est une autre paire de manches. Si je ne cache pas trop mon amante de quinze ans, mes aventures avec les petits garçons se déroulent dans une stricte clandestinité. Notre civilisation est si vulgairement, si platement phallocratique qu’une jolie fille, même très jeunette, excite toujours une sorte de complicité égrillarde (le mec qui vous pousse du coude, cligne de l’œil, « elle était vierge ? vous étiez le premier ? sacré veinard ! sacré roquentin ! »). Nul ne s’offusque des photos érotiques d’Hamilton, dont les modèles sont des adolescentes, non plus que de celles d’Irina Ionesco qui fait poser une fillette de dix ans – sa propre fille – nue et dans des attitudes d’une extravagante lascivité. Mais qu’un photographe essaye de publier des albums analogues en remplaçant les fillettes et les adolescentes par des garçonnets de douze ou quinze ans ! Ce serait le scandale, la saisie immédiate. Le silence qui entoure l’œuvre de Goor, ce merveilleux peintre des jeunes garçons, est à cet égard significatif et forme un éclairant contraste avec la notoriété de tel peintre de second ordre mais spécialisé dans les nanas. La vérité est que le charme érotique du jeune garçon est radicalement nié par la société occidentale moderne qui rejette le pédéraste dans le non-être, royaume des ombres, Katobasiléia. Le postulat de notre époque, c’est qu’un jeune garçon n’est pas désirable. Thomas Mann a bien décrit l’angoisse, l’affolement d’Aschenbach – homme « normal » qui vit dans un monde où il est entendu une fois pour toutes qu’un gamin ne peut être ni troublant ni troublé – lorsqu’il découvre grâce aux quatorze ans et aux boucles blondes de Tadzio que ce n’est pas vrai, que le désir pédérastique existe, qu’il est la raison et la nature mêmes, que les interdits sexuels et affectifs qu’il avait acceptés jusqu’alors ne sont qu’une imposture. Le salut pour Aschenbach serait de prendre l’enfant dans ses bras, de poser ses lèvres sur les siennes ; mais les blocages sont trop impérieux, la peur de vivre trop paralysante, et une fois de plus le pédéraste est réduit à la fuite, au néant, au royaume de la mort.
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Ils avaient été voir le Pinocchio de Comencini dans un cinéma du boulevard Raspail, Nil et Jean-Marc étaient assis côte à côte, encadrés par les parents. Durant toute la séance, comme ils étaient en sandales, le petit garçon avait caressé le pied nu de Nil avec ses orteils...
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