C’est donc surtout dans l’ornement, et par extension dans l’objet, que Guimard a donné le meilleur de lui-même, avec une liberté absolue. Habile à concevoir une composition compliquée mais toujours harmonieuse, il usa de l’intérêt que lui inspirèrent toutes sortes de techniques pour inventer les éléments décoratifs nécessaires à ses maisons, mais aussi des vases, des cadres, des meubles. Sa curiosité alla jusqu’à dessiner les broderies des rideaux de l’hôtel Guimard, la robe de mariée de sa fiancée, sa propre canne en argent, quelques bijoux, et même une automobile !
[…] Dans les creux du dessin de Guimard, se cache le geste de l’artiste, son impétuosité, son énergie. Sa nervosité aussi. Sans aller jusqu’à affirmer que l’ornement guimardien permet de faire le portrait psychologique de son auteur, il est certain que sa pratique évolue d’une façon logique qui ne nous fait jamais oublier qui en est l’auteur. Son imagination, presque dénuée d’antécédents, est foncièrement personnelle. Et donc incomparable.
La manière développée par Guimard au cours de ces années [1896-1903] peut être définie comme dynamique et effervescente, parfois non dénuée d’une certaine brutalité. On en voit la force vitale dans les meubles conçus à la même époque, extraordinairement inventifs, mais parfois inutilement compliqués. Si l’architecte put s’appuyer sur une clientèle convaincue, il n’est pas certain que son art ait été compris par beaucoup de ses contemporains ; les édicules du métro, qui suscitent étonnement, crainte, voire incompréhension, en sont les témoins.
Il [Hector Guimard] se refusa à s’imposer comme le chef de file de la nouvelle architecture, préférant rester un novateur isolé. Il n’était pourtant pas misanthrope, aimant se montrer à des réceptions, des bals ou des conférences. Causeur spirituel et homme élégant, il savait vivre en société et s’y faire remarquer.