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Citation de missmolko1


Le Majestic fendait les eaux du port de New York par un beau matin d’avril. Il renifla au nez des remorqueurs et des bacs à l’allure de tortue, adressa un clin d’oeil à un jeune yacht aguicheur, et d’un coup de sirène revanche, écarta de son chemin un transport de bestiaux.

Puis il s’amarra à son quai personnel avec autant de manière qu’une grosse dame qui s’assied, et annonça complaisamment qu’il venait tout droit de Cherbourg et Southampton en transportant à son bord l’élite du monde. L’élite du monde, debout sur le pont, agitait idiotement la main en direction des parents pauvres qui attendaient, sur le quai, leurs gants de Paris.

Un grand toboggan eut tôt fait de réunir le Majestic au continent nord-américain, et le navire commença à dégorger l’élite du monde, autrement dit Gloria Swanson, deux acheteurs de chez Lord & Taylor, le ministre des finances de Graustark se proposant de consolider la dette, et un roi africain qui avait passé tout l’hiver à essayer de débarquer quelque part et souffrait d’u violent mal de mer. Les photographes travaillaient ferme pendant que le flot des passagers s’écoulait sur le quai. Des applaudissements explosèrent pour saluer l’apparition sur des civières de deux natifs du Middle-West qui s’étaient saoulés à mort pour fêter la dernière nuit de traversée.

Le pont se vida graduellement, mais, alors que la dernière bouteille de Bénédicte était parvenue à quai, les photographes restaient à leur poste. L’officier responsable du débarquement se tenait planté au pied de la passerelle, et regardait alternativement sa montre et le pont, comme si une partie précieuse de la cargaison se fut encore trouvée à bord. Un long « Ah-h-h ! » de satisfaction monta enfin de la foule groupée autour du débarcadère, lorsqu’un cortège singulier commença à descendre du pont B.

En tête venait deux femmes de chambre françaises, chargées de petits chiens violacés, et suivies d’une escouade de porteurs, aveugles et invisibles sous d’innombrables gerbes de bouquets de fleurs fraîches. Une autre femme de chambre venait derrière ; elle tenait par la main un enfant aux yeux tristes, un petit orphelin à l’air français ; il était lui-même talonné par l’officier de second, qui traînait deux borzoïs neurasthéniques contre leur gré et contre le sien propre. Il y eut une pause.

Puis le capitaine, Sir Howard George Witchcraft, apparu au bastingage, flanqué de quelque chose qui aurait pu être un tas de somptueux renards argentés.
Rags Martin-Jones, après cinq ans dans les capitales européennes, revenait sur sa terre natale !
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