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Citation de Sangpages


Notre table devient l’élément vers lequel tous les regards se fixent, l’épicentre de la turbulence contagieuse qui commence à gagner tout l’espace. L’assemblée nous arrose d’une masse de sentiments divers. Je sens de la colère, du mépris, de la haine, de l’incompréhension, et d’autres . Le trouble grandissant me frôle dans une caresse légère. D’une grande inspiration, je tente d’absorber ce énergies négatives. Je renifle la peur, l’inquiétude, la panique. Le trouble grandissant me frôle dans une caresse légère. D’une grande inspiration, je tente d’absorber ce torrent d’agitation, de l’inhaler comme un dragon d’héroïne.
C’est comme ça que j’existe. C’est comme ça que je prends corps, que les limites de ma chair se dessinent clairement dans le vide qui me noie. Je ne connais pas d’autre moyen: susciter des émotions vives autour de moi m’aide à valider mon existence physique. Peu importe la nature de ces émotions, positives ou négatives, ça n’a aucune importance. Ce qui compte c’est la quantité, pas la substance. Ce qui est d’ailleurs vrai pour beaucoup de choses.
C’est ce qui me permet d’oublier ma course humaine pitoyable, mon ellipse minable autour de ce monde rongé jusqu’au noyau.
Il n’y a que ça.
Le reste est un vaste mirage.
Vous comprenez, j’ai foi en le chaos, il me faut de l’agitation pour pouvoir respirer. L’époque me pose ce problème majeur: elle est incompatible avec le fonctionnement de mon appareil psychique. On m’étouffe. On me contraint à des normes inadéquates. On me met face à des obligations contraires à mes fonctions vitales. Tout ce qui m’impose les limites du Bien et du Mal s’oppose à mes instincts. Les lois, les règles et la morale pèsent sur mon thorax. Elles empêchent mes poumons de se remplir correctement.
Je suis un poisson sur le sable. Mes branchies s’agitent frénétiquement dans le néant.
Dans le bordel de ce millénaire qui commence très mal, je cherche de l’air avec l’énergie du désespoir. Il me faut créer des enclaves, des microcosmes saturés de désordre, parcourus de spasmes anarchiques, de tremblements illogiques, d’émotions fortes, de sentiments puissants. Ecraser le métronome, créer des contretemps. Briser tout ce qui est immobile. Amorcer le mouvement et en perdre volontairement le contrôle.
C’est pour ça que je m’agite. Chacun de mes gestes cherche à percer l’invariable, à faire exploser l’immuable, le permanent, l’établi.
Je sais que c’est pathologique.
J’ai conscience du problème.
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