Là-bas tout au bout de la ligne d'horizon
des minuscules semblent se donner la main
D'ici ce sont des lettres mais nous construisons
notre autostrade vers les ultimes humains
C'est pourquoi en grande hâte nous traduisons
des poèmes nous ajustons des parchemins
ligne par ligne afin de paver le chemin
d'une langue à venir fibre d'un corps commun
Nous visons aux confins des steppes millénaires
les frères de demain déliés et miliaires
inscrutables signes ailés au fond de l'œil
Rien ne permet d'en voir poindre l'avènement
et nous nous affairons dirait-on vainement
tatillonnes fourmis d'un invisible seuil
La mer qui roule infiniment sur la
terre sans jamais la soumettre et sans
battre en retraite et dévoiler les plans
du dernier désert que l'homme verra ;
soleil trop vieux au fond d'un soir trop froid
pour mettre à la mer même un rayon blanc
houle sur houle éternel océan
même bélier éternellement las
Nuages noirs en loques de méduse
vol d'incendie mobile qui abuse
le vacancier imposteur des bergers ;
de tout cela où mon regard divague
depuis trente ans je n'ai rien su garder
filant sans cesse aussi vain que la vague