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Citations de Gunnhild Oyehaug (24)


À cause de ces rêves éveillés qu’il fait, totalement banals mais non moins inaccessibles pour ceux qui comme lui les font, notamment de la serrer dans ses bras et de la soulever délicatement du sol comme si elle était une plume, de lui chuchoter des choses à l’oreille et dans ses cheveux ; à cause de tout ça, à cause des rêves éveillés qu’il fait sur cet instant où elle aussi lui dira, avec ses yeux scintillants, qu’elle l’aime et qu’elle l’a aimé dès le premier jour ! et que ce n’est pas grave que son film ne se fasse pas, mais bon – à cause de tout ça, il n’a rien dit. Mais aujourd’hui il va le dire.
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Elle lui a donné le désir ardent de la serrer dans ses bras et de la soulever délicatement du sol comme si elle était une plume. Ensuite, la lecture de la scène avec les momies lui a fait chaud au cœur : et dire qu’elle, cette jeune femme adorable, est capable d’écrire une scène pareille où une attirance magnétique apparaît entre une femme jeune et un homme plus âgé qu’elle – cela signifiait-il qu’elle était attirée par les hommes plus âgés qu’elle ? Puisqu’il était, du haut de ses cinquante et un ans, plus âgé qu’elle. Pouvait-elle être attirée par lui ? Voilà l’une des nombreuses pensées sous-jacentes qui poussaient Robert à s’intéresser encore plus au scénario de Linnea, lequel portait sur une relation en devenir entre une jeune femme et un homme plus âgé. Or, là, quand il fait ce rêve éveillé où il la serre dans ses bras, le sujet du film commence légèrement à le tourmenter. A-t-elle vécu personnellement la scène qu’elle décrit ?
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Seulement voilà, il n’a pas le courage de lui briser le cœur. Pourquoi ? Pourquoi un riche producteur de films n’a-t-il pas le courage de briser les rêves d’une jeune réalisatrice ? Pourquoi un producteur de films joue-t-il à une mystification aussi gigantesque où il roule dans la farine tous les employés de sa société de production en leur faisant croire qu’il prépare un projet certes très particulier mais aussi très lucratif dans l’avenir dont il exige d’assurer la direction sous prétexte que la réalisatrice est si sensible et si spéciale ?
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Elle ne pouvait pas savoir qu’il avait remarqué sa présence sur un mode presque physique mais aussi, il faut l’avouer, très symbolique dans la mesure où il était un professeur de littérature doué d’un sens très aigu des structures symboliques : ils étaient ici, dans cette salle, deux êtres vivants, un homme et une femme, et là-bas, dans la vitrine, deux êtres morts depuis longtemps, un homme et une femme.
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Elle a tressailli, ou quasi, en découvrant une autre personne. Dans cette pièce bleue et obscure, à peine éclairée, peuplée de momies exhibées de toutes parts en position debout derrière des parois vitrées et de deux autres en position couchée placées pour leur part à l’intérieur d’une vitrine dans le milieu de la pièce, cet être humain lui paraissait extrêmement vivant et tangible. Il avait des cheveux blancs coupés court, une barbe également blanche et également courte, mais des sourcils toujours foncés et qui plus est broussailleux. Il a levé les yeux vers elle puis l’a regardée comme si elle était quelque chose qui se déroulait très, très loin au fond de l’horizon, comme quelque chose qu’il entrapercevrait, et sa façon de baisser la tête sur la sur la vitrine après avoir tout juste remarqué sa présence le rendait incroyablement attirant, trouvait et sentait Linnea. Il paraissait porter le poids du monde sur ses épaules.
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Elle portait un marcel noir et un pantalon serré également noir, elle avait des bras longs et costauds. Jamais il n’avait vu quelqu’un jouer de la basse comme elle, avec un air aussi agressif et aussi sexy. Il était accompagné de l’une de ces femmes dont il avait touché la tête, mais, là, à la vue de cette créature qui semblait jouer de la basse comme si elle avait en elle tout ce que lui-même avait en lui de sexe et d’agressivité, avec en plus une bonne dose de désinvolture musicale – une espèce de folie à la fois pleine de tendresse – il a perdu toute sa concentration.
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« Avoue que c’est quand même bizarre, on a l’impression que d’une certaine manière elle s’est mise en scène. Et c’est absolument génial si tu prends, c’est un exemple, la scène d’ouverture où on voit Charlotte, de dos, allongée sur un lit, mais on ne voit qu’un bout de son dos et de ses fesses jusqu’au début des jambes, elle porte une petite culotte transparente, et là le titre du film apparaît, en trois mots comme qui dirait séparés, d’abord « Lost », ensuite « in » qui vient se poser environ au milieu des fesses de Charlotte, et enfin « Translation », un peu plus loin, et… oui, je veux dire… la façon qu’ont les mots d’apparaître, leur façon de glisser sur l’écran avant de pâlir et de disparaître, eh bien figure-toi que Sofia Coppola est PILE pareille.
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Elle s’est quand même parfois demandé si ce ne serait pas Scarlett Johansson, l’actrice qui joue le rôle de Charlotte, et non le film qu’il adore, et elle a sombré dans le trente-sixième dessous car elle ressemble tellement peu à Scarlett Johansson. Elle a par exemple des seins moitié moins gros. Elle a même un cinquième de ses seins. Quand elle a commencé à en avoir, elle les regardait sous la douche en se réjouissant à l’idée qu’ils grossissent – sauf qu’ils n’ont jamais grossi. Ça a été une des plus grandes déceptions dans la vie de Sigrid. Elle était sous la douche à treize, à quatorze, à quinze, à seize, à dix-sept ans, et elle pensait : quand j’aurai dix-huit ans, ils seront sûrement plus gros que maintenant. Or, à dix-huit ans, toujours sous la douche : des seins tout aussi riquiqui qu’à treize. Et elle a dû l’accepter, pas le choix !
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Pourquoi ne pas bambocher et picoler, se déhancher et se déchaîner, se tortiller et surtout se désentortiller de soi-même. Ça, se désentortiller de soi-même, il s’était acharné à le faire du mieux possible. Puis sa grand-mère était morte. Comme si l’univers décrétait : dorénavant, tout ce qui est toi meurt. Et il pense donc à présent : par moi ils vont dans l’éternelle douleur ! Voilà ce qu’il a fait ! Il n’a pas été fidèle à lui-même. Ce n’était pas à une porte de l’Enfer que Dante faisait allusion par ces mots, pense-t-il tandis qu’il se tient devant la tombe. Dante faisait allusion aux actions par lesquelles on s’illustre. Le MOI dans ces actions. Quel est le moi en lui ? Le moi en lui est le tremblement.
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L’amour, la littérature ! Elle s’est contentée de lui répondre que sa nervosité commençait à lui taper sur le système, sans oublier sa certitude que les choses pouvaient exploser d’un instant à l’autre (et tant pis s’il savait qu’elles ne le feraient pas), ses sempiternels examens de conscience et ses tergiversations, son incapacité à suggérer des activités en commun, et enfin le fait on ne peut plus patent qu’il l’adulait, une soumission qu’elle trouvait problématique pour ne pas dire chiatique – bref, elle en avait sa claque.
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À l’école de cinéma, son plus grand désir était : filmer quelque chose capable de montrer ce chatoiement. Plus que tout, elle voulait montrer ce jeu de lumière sur un écran microperforé derrière lequel elle placerait un projecteur lumineux qui éclairerait le public à travers la toile, si bien que les spectateurs en resteraient pantois d’admiration. Et un « OOOOHHHH » balaierait alors la salle.
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Il a beau porter une tenue chic et chère comme à son habitude, il a toujours un truc qui cloche, qui fait que ses vêtements sont tantôt un poil trop blousants, tantôt un poil trop de traviole, tantôt un poil trop serrés au niveau des épaules. Comme s’ils avaient accepté, mais vraiment à contrecœur, de finir sur ce corps. Comme s’ils avaient fini par se dire : Bon, ok, si on n’a pas le choix – mais, de colère, en claquant les portes à plusieurs reprises. Robert relève la tête vers elle avec des yeux quasi écarquillés, à croire qu’il vient juste de décider de prendre sur lui pour la regarder.
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Et elle voit qu’elle n’est pas d’une beauté à couper le souffle, elle voit au contraire qu’elle a des cheveux bruns trop ébouriffés et des sourcils trop broussailleux, des lèvres pas assez pulpeuses et une mine chiffonnée. En plus elle porte le gros pull qu’une tante destinait à un oncle mais qu’elle a complètement raté, tricoté à la main avec une laine marron clair et pelucheuse qui lui donne l’allure d’une ourse en peluche. Il tombe évidemment sous le sens qu’un pull beigeasse et trop grand pour celle qui le porte n’a pas le même effet qu’une chemise d’homme trop grande : dedans, elle n’a l’air ni adorable ni vulnérable, elle a juste l’air grosse et sotte. Quoique, son absence de vulnérabilité et… allez, d’adorabilité, s’explique peut-être par le fait qu’elle n’est pas pieds nus.
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Elle s’imaginait la jetée battue par les vents, une jetée blanche qui s’avançait dans la mer, une mer noire et sombre autour de ce lit blanc qui se terminait dans la mer noire et froide. « Ça donne la chair de poule, tu sais », a-t-elle dit. Elle avait la brusque sensation d’avoir en elle une jetée identique : une petite jetée blanche, entourée d’immenses ténèbres lourdes.
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Vingt ans de plus qu’elle, pile ! Elle soulève Kåre pour le regarder dans les yeux. Mais elle a beau faire, elle n’a pas accès à un mystérieux lien intérieur pour autant. Aussi repose-t-elle Kåre à sa place temporaire et ouvre plutôt dans son ordinateur le document intitulé La femme battue par les vents. Elle s’est inspirée, pour ce titre, d’un poème de Geir Gulliksen dans lequel une femme erre pieds nus et vêtue d’une chemise d’homme froissée trop grande pour elle, et qui est l’heureuse propriétaire d’un lit ressemblant à une jetée battue par les vents. Sigrid adore ce poème.
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Cette situation est tout sauf authentique, il se tient devant une assemblée encostumée et entailleurisée et réussit à faire rire les gens, ils rient de ce qui arrive à son personnage principal, exactement comme ils le doivent – seulement voilà, Kåre n’est pas du tout à ce qu’il fait.
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Pour peu que nous prenions soin de le regarder, et que nous sachions qu’il est âgé de quarante-trois ans, que nous le voyions porter un jean et un sweat à capuche ainsi que des Adidas bleues, nous pouvons penser qu’il tente avec l’énergie du désespoir de paraître plus jeune qu’il ne l’est en réalité. Mais nous pouvons aussi penser qu’il se fiche éperdument de donner l’impression qu’il tente avec l’énergie du désespoir de paraître plus jeune qu’il ne l’est en réalité : il aime porter un sweat à capuche. Il s’en contre-tape, Kåre, de donner l’impression qu’il a les deux pieds dans la crise de la quarantaine. Les sweats à capuche correspondent à l’homme qu’il est et a toujours été. Il ne porte pas de chemise sous un costume. Ça ne lui viendrait même pas à l’idée. S’il doit assister à un enterrement en jean et en sweat à capuche, il le fait, Kåre. Il nous faut à ce stade ajouter que ses Adidas flambant neuves sont complètement raccord avec l’apparence qu’il veut donner : tout doit avoir, de préférence, une touche un peu usée, un peu trop portée. Son sweat à capuche, il a l’air un peu râpé ; et son jean, idem, en plus d’être noir, de faire rock’n roll sur les bords.
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Kåre signifiait tout bonnement celui qui a les cheveux bouclés. Ça n’avait pas plus d’importance que ça, ça ne changeait rien au lien mystérieux qu’elle éprouvait intérieurement entre elle-même et le regard de Kåre Tryvle reproduit en quatrième de couverture du livre. Elle avait vraiment la sensation que c’était réel, qu’elle savait qui il était.
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Elle a dévisagé le portrait, caressé le recueil du bout des doigts, puis elle a pensé : nous nous comprenons. Sauf que tu ne le sais pas. Oh, toi, Kåre, pensait-elle, et tant pis si elle remarquait que, en pensant à son prénom, ce n’était pas très naturel. Elle a essayé de le prononcer à voix haute, K Å R E, mais sa voix était alors comme déformée.
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Elle le trouvait très beau, ce Kåre Tryvle, forcément : il avait les cheveux bruns et un je-ne-sais-quoi qui rappelait Jon English dans son allure un peu carrée, une espèce de Jon English en plus distingué ; mais c’est surtout le regard qu’elle s’est un peu figée pour regarder. Comme s’il la fixait droit dans les yeux, comme si elle avait baguenaudé de-ci de-là en se sentant d’une insondable solitude et puis, là, entre les rayonnages, se trouvait un regard qui ne voyait rien d’autre que ça : l’insondable solitude de Sigrid.
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