Richard Breitmann conclut sa biographie d'Himmler en constatant avec accablement que l'architecte du meurtre de masse fut jusqu'au bout convaincu d'avoir été quelqu'un de moral. Vue d'aujourd'hui, cette appréciation n'est pas acceptable, mais sans doute le fut-elle jusqu'en 1945 dans de vastes portions de la population allemande non juive. Cela signifie clairement qu'en analysant l'action des exécuteurs on ne peut pas partir d'une conception universelle de la morale, dont évidemment les critères feraient d'eux des êtres immoraux, mais d'une conception morale particulière s'écartant de la nôtre et qui a pu, dans la perspective des acteurs, revendiquer une validité et guider leurs actes.