Harry Couvin

Même si sa nuit avait été très agréable, il arriva au boulot un peu perturbé. De nombreuses questions lui traversaient l’esprit. Des bouts de pensées sans relations entre elles. C’était assez pénible, d’autant qu’il faisait beau et qu’il aurait dû se la couler douce en attendant le soir pour recommencer la chasse au superhéros.

Très en avance, il se mit à parcourir la presse sur son ordinateur, histoire de se changer les idées. Après les nouvelles nationales, il alla se préparer un café pour tremper les croissants achetés à la boulangerie. Ensuite, il alla jeter un coup d’œil sur les infos locales. Rien sur notre pervers en combinaison. C’était déjà un souci en moins et il éviterait ainsi le coup de fil matinal de Coutence, qui avait tendance à lui gâcher la digestion du petit-déjeuner.

Une bonne planque est une planque la moins inconfortable possible. Il savait cela depuis qu’il avait commencé ce métier. Et pour qu’elle soit également efficace, il faut se fondre dans l’environnement. Pour parvenir à ces deux objectifs, la préparation en amont est primordiale. La veille, il avait bien repéré les lieux. Si dans les grandes villes, l’activité générale vous rendait plus facilement invisible, dans un univers plus rural, il fallait être plus malin. À Veneux-les-Sablons, comme dans toutes les petites communes, la moindre voiture inconnue suscite une méfiance certaine. Il faut donc stationner à l’endroit idéal pour ne pas être remarqué.

Trois quarts d’heure plus tard, il sortait de Melun par le sud sur la D606. Il roulait sur l’ancienne Nationale 6 en direction de Fontainebleau à travers la forêt. Il avait mis London Calling avec une dose efficace de décibels. Un minimum pour écouter The Clash. Avec ce petit rayon de soleil qui passait à travers les nuages, une impression de partir en vacances flottait dans l’air. Mais il était assez intrigué par ce rendez-vous de Coutence.

Vers deux heures du matin, ils étaient étendus l’un à côté de l’autre, complètement délassés par leur étreinte. Dehors un chien aboya et le grand héron qui vivait dans les parages poussa son cri strident. Il pensa un moment à Lola, sa femme disparue, mais Alice rompit le silence.

— Alors comme ça, tu n’es pas musicien ?

— Non, je suis flic.

Au moment de récupérer son blouson, il sortit ses clés de voiture de sa poche et les laissa tomber discrètement dans le bas de la penderie. Tout le monde se salua dans l’entrée et félicita la maîtresse de maison avant de regagner son véhicule.