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Citation de enjie77


Mon père n'aima jamais l'exercice direct de la médecine et il y avait là, selon ce que je pus reconstituer bien plus tard, une sorte de traumatisme précoce dû à un professeur de chirurgie à l'université. Il l'avait un jour obligé à retirer la vésicule d'un patient alors qu'il n'avait pas encore assez de métier et pendant la cholécystectomie qui est une opération délicate, il avait ligaturé le cholédoque du malade, un homme jeune d'environ quarante ans qui était mort quelques jours après l'intervention. Mon père fut toujours d'une maladresse absolue. Il était trop intellectuel même pour un médecin et manquait totalement de cette adresse de boucher que doit avoir, en tout cas, un chirurgien. Pour lui, même changer une ampoule était des plus difficiles, ne parlons pas d'une roue (quand il crevait, disait il en se moquant de lui-même, il devait s'arrêter au bord de la route, comme n'importe quelle femme, et attendre qu'un homme lui porte secours) ou de la révision du carburateur (qu'est-ce que c'est que ça ?) ou d'extraire proprement une vésicule sans toucher les conduits délicats qui passent par là. Il ne comprenait pas la mécanique et conduisait à grand-peine des voitures automatiques parce qu'il avait appris tardivement à conduire, et toute sa vie, chaque fois qu'il devait affronter l'acte héroïque de s'engager dans un rond-point au milieu de la circulation intense, il le faisait en fermant les yeux et il disait éprouver, chaque fois qu'il prenait le volant, "une profonde nostalgie pour le bus". Il n'était pas plus apte à aucun sport et en cuisine, il était plus que nul, incapable de se faire un café ou un œuf à la coque.

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