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Citation de Partemps


XXXI.
Enivrées du clair de lune, les fleurs du tilleul épanchent leurs parfums, et les bois et les airs retentissent des chants du rossignol.

« Il est doux, ô bien-aimé, de s’asseoir sous ce tilleul, quand les rayons d’or de la lune brillent à travers son feuillage protecteur.

« Regarde cette feuille, tu verras qu’elle a la forme d’un cœur; c’est pour cela qu’entre tous les arbres les amoureux choisissent de préférence le tilleul et aiment à deviser sous son ombre. « Mais tu souris, comme perdu en des songes lointains. Parle, ô mon bien-aimé, quels sont les désirs qui germent dans ton cœur?

« — Ah volontiers, ma mignonne, je t’en ferai l’aveu. Je voudrais qu’une froide bise, venant du nord, soudain nous envoyât une blanche tombée de neige,

« Et que nous, des traîneaux peints de couleurs bariolées, au bruit des grelots sonores, aux claquemens des fouets, nous emportassent, bien enveloppés de fourrures, à travers les plaines et les rivières gelées ! »

XXXII.
Dans la forêt, au clair de lune, la nuit dernière, je vis passer les elfes. J’entendais retentir leurs cors, j’entendais sonner leurs clochettes.

Ils chevauchaient sur de petits coursiers blancs qui portaient des ramures d’or, et ils fendaient les airs aussi rapidement qu’une troupe effarouchée de cygnes sauvages.

La reine, en passant au galop, me fit un signe de tête et me lança un sourire. Souriait-elle de me voir encore une fois amoureux ? ou bien son sourire était-il un présage de mort?

XXXIII.
Le matin je t’envoie les violettes que j’ai trouvées dès l’aube dans la forêt, et le soir je t’apporte les roses que j’ai cueillies à l’heure du crépuscule.

Sais-tu ce que pourraient te dire ces belles fleurs dans leur langage symbolique? Sois-moi fidèle dès le matin, et aime-moi pendant toutes les nuits.

XXXIV.
La lettre que tu m’as écrite ne m’inquiète pas du tout. Tu ne veux plus m’aimer, mais ta lettre est bien longue.

Douze pages d’une écriture serrée et charmante! un petit manuscrit! On n’écrit pas avec tant de soin pour donner congé.

XXXV
Ne crains pas que je trahisse mon amour devant le monde, lorsque mes lèvres, au sujet de ta beauté, débordent en métaphores.

Sous une forêt de fleurs, il est profondément et soigneusement caché, ce secret brûlant, ce feu profond et discret.

Si parfois des étincelles suspectes jaillissent du milieu des roses, — ne crains rien ! le monde de nos jours ne croit pas aux flammes véritables, et il prendra tout cela pour de la poésie.

XXXVI
Les bruits dont le printemps remplit le jour, il en remplit aussi mes nuits; ses échos et ses reflets se glissent jusque dans mes songes.

Seulement, comme en un pays de fées, les oiseaux alors chantent des mélodies plus gracieuses, les airs sont plus suaves, le parfum des violettes monte plus ardent, plus voluptueux.

Les roses aussi brillent d’un éclat plus vif; elles portent des gloires d’or, comme les petites têtes d’anges dans les tableaux d’église.

Moi-même il me semble alors que je suis un rossignol et que je chante mou amour à ces roses entourées d’auréoles. Je chante en rêvant de merveilleuses mélodies.

Et tout cela dure jusqu’au moment où je suis réveillé par les rayons de soleil ou par le tapage charmant de ces autres rossignols qui bourdonnent en face de ma fenêtre.

XXXVII.
A la voûte du ciel, les étoiles avec leurs petits pieds d’or cheminent tout doucement, tout doucement; elles craignent d’éveiller la terre, qui dort tranquille au sein de la nuit.

Les forêts silencieuses sont là qui écoutent : chaque feuille est une oreille verte ! et la montagne, en rêvant, étend son long bras d’ombre.

Mais qui appelle? L’écho de ces accens a retenti dans mon cœur. Était-ce la voix de ma bien-aimée? ou était-ce seulement le rossignol?

XXXVIII.
Le printemps est sérieux, ses rêves sont tristes, chaque fleur semble pénétrée de douleur; il y a une mélancolie secrète dans le chant du rossignol.

Oh! ne souris pas, chère belle, ne souris pas si gaiement, si joyeusement! Oh! pleure plutôt; je voudrais avec un baiser essuyer une larme sur ta joue.

XXXIX.
Déjà je dois m’arracher du cœur que j’aime si tendrement, déjà je dois m’en arracher. Si tu savais combien il m’en coûte de partir!

La voiture roule sur le pont qui craque, le fleuve sous le pont coule morne et triste. Encore une fois, je dis adieu à mon bonheur, je dis adieu au cœur que j’aime tendrement.

Les étoiles filent au ciel comme si elles fuyaient devant ma douleur. Adieu, à bien-aimée! dans les pays lointains, partout où je serai, ton image sera dans mon âme.
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