Parce qu'ils étaient trop peu nombreux pour arrêter l'avalanche des images, l'égout des images. Parce que nous étions naïfs à vouloir nous convaincre qu'une vérité pouvait sortir de cette purulence iconographique. On n'avait pas tué moins depuis qu'on avait montré les morts des camps ; on n'avait pas torturé moins depuis qu'un bref émoi avait secoué le monde devant des hommes humiliés, à genoux, le corps nu et la tête dans un sac à papier à Abou Ghraib. Je ne pourrais faire autant d'émissions que je voudrais, je ne changerais rien à cela.
Je ne pouvais, en vérité, qu'avouer ma défaite devant le très vieux goût du meurtre, de l'écrasement et de la haine qui habitait ces clichés. Et constater que notre seul, infime, dérisoire pouvoir consistait à nous refuser à ceux, prédateurs, qui n'avaient pour autre objet que de nous imposer la vue du résultat encore palpitant de leurs lamentables chasse à courre.