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Citations de Henri Deleersnijder (8)


Le sursaut de l’entre-deux-guerres

11 novembre 1918 à 11 heures : l’armistice entrait en vigueur, et, avec lui, prenait fin la Grande Guerre. Le bilan de celle-ci, qui devait être la « der des ders », suscite encore aujourd’hui l’épouvante : même s’il est impossible de chiffrer avec exactitude le nombre de ses victimes, on estime celui de ses morts – militaires et civils – à 18 millions environ, auxquels s’ajoutent les 17 millions de blessés dont près d’un tiers d’infirmes (mutilés, gazés, « gueules cassées ») et quantité de traumatisés à vie. Le nombre d’hommes sous les drapeaux qui ont été tués sur le front de l’Ouest est terrifiant, lui aussi : 1 393 000 Français, 1 950 000 Allemands, 776 000 Anglais, 114 000 Américains et 44 000 Belges.
Ceci dit, en présence d’un tel carnage où La Faucheuse fut durablement épaulée par la folie nationaliste des hommes, on ne peut qu’être ému par la question toute simple – mais ô combien révélatrice – posée par une petite fille à sa maman agenouillée devant la tombe improvisée de son mari mort au combat : « Papa sait-il qu’on est vainqueur ? »
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Quand l’idée devient réalité

À la veille de la Révolution française, évoquant les provinces du royaume, Mirabeau (1749-1791) parlait d’« un agrégat de peuples désunis ». L’image aurait pu convenir aussi bien aux pays européens, meurtris et divisés, au sortir de la Seconde Guerre mondiale. À l’est, ils avaient été libérés, à l’exception notoire de la Yougoslavie, par l’Armée rouge, ce qui les fit très vite entrer dans l’orbite soviétique. À l’ouest, ils l’avaient été par les troupes américaines, mais comme pas mal de leurs citoyens risquaient d’être tentés par le communisme, les Anglo-Saxons – États-Unis en tête et Churchill en sentinelle vigilante – veillèrent à les en dissuader. Le plan d’aide matérielle lancé outre-Atlantique en juin 1945, connu sous le nom de plan Marshall, poursuivait ce but, tout en s’engageant à redonner du souffle à une économie européenne devenue exsangue. C’est d’ailleurs à toute l’Europe qu’il était destiné, URSS comprise, mais Staline le refusa : la Tchécoslovaquie, qui l’avait initialement accepté, en fit d’ailleurs les frais.
En fait, depuis février 1945, l’Europe se trouvait prise dans les rets de Yalta, même si tout ne se décida pas à son propos au cours de cette conférence réunissant Roosevelt, Staline et Churchill au bord de la mer Noire. Mais l’appui apporté à l’Europe occidentale par Washington ne pouvait être mené qu’à une condition expresse : que les États du Vieux Continent s’unissent ! L’Organisation européenne de coopération économique (OECE) – future Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) –, regroupant les seize pays qui acceptaient le plan Marshall, fut créée à cette fin en avril 1948.
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Et maintenant ? Il ne faut pas être atteint du syndrome de Cassandre pour s’apercevoir que le ressort est cassé. La construction européenne n’avait pourtant pas trop mal démarré dans les années 1950, en dépit de l’accroc de la CED. Le traité de la CEE, donnant l’impulsion au Marché commun, visait à « établir les fondements d’une union sans cesse plus étroite entre les peuples européens ». Ceux-ci allaient désormais bénéficier, au sein de la Communauté, de la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux. Même l’historique opposition entre la France et l’Allemagne était en passe de s’apaiser : le 15 septembre 1958, peu après son retour au pouvoir, Charles de Gaulle recevait Konrad Adenauer chez lui, à la Boisserie, rencontre qui aboutira, le 22 janvier 1963, à la signature entre les deux pays du traité de l’Élysée, lequel instaurait entre les anciens « ennemis héréditaires » une coopération accrue dans les domaines des relations internationales, de la jeunesse et de l’éducation, tout en voulant détacher dans la mesure du possible Bonn de son puissant protecteur américain. Et l’entente, pour ne parler que des deux mêmes pays, se poursuivra par la suite entre le président Valéry Giscard d’Estaing et le chancelier Helmut Schmidt, ainsi qu’entre François Mitterrand et Helmut Kohl : qui ne se souvient de la photo où les deux hommes se tiennent main dans la main, le 22 septembre 1984, au cimetière de Douaumont lors de la commémoration de la bataille de Verdun.
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Le siècle des Lumières

« Le bonheur est une idée neuve en Europe », lançait dans son discours du 3 mars 1794 à la Convention, en une formule devenue célèbre, « l’Archange de la Terreur » ou « de la Révolution » Saint-Just. On était alors à la fin du siècle des Lumières. À son début, dans un registre moins prométhéen, Charles-Irénée Castel de Saint-Pierre (1658-1743) rêvait d’apporter la « félicité » à cette même Europe, laquelle venait d’être passablement ravagée par les guerres de Louis XIV. Resté connu sous le nom d’abbé de Saint-Pierre, il avait participé, aux côtés du cardinal de Polignac, aux négociations qui allaient aboutir en 1713 à la paix d’Utrecht mettant fin à la guerre de succession d’Espagne.
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L’ère des nationalités

S’il exerça une influence considérable sur le développement économique de la France au cours de la première révolution industrielle, en particulier dans les voies de communication (réseau ferroviaire en tête), le saint-simonisme ne parvint pas à installer les institutions pour l’Europe qu’avait imaginées Saint-Simon. Non que le grain mâtiné de spiritualité qu’il avait semé n’ait pas germé dans des esprits prêts à l’accueillir, mais d’autres préoccupations, notamment sociales, s’étaient le plus souvent greffées sur des projets de penseurs que l’on peut voir comme des disciples ou, du moins, comme des continuateurs du maître.
Auguste Comte (1798-1857) a été le premier d’entre eux qui devint d’abord, après Augustin Thierry, le secrétaire et collaborateur de Saint-Simon. Fondateur du positivisme – seules les sciences offrent une porte d’entrée à la vérité –, ce philosophe qui a jeté les bases de la sociologie moderne en France a conçu une « République occidentale » à laquelle devaient tôt ou tard adhérer non seulement les différents pays d’Europe, mais aussi les États-Unis et plusieurs nations sud-américaines. Du reste, « Ordem e Progresso » (« Ordre et Progrès ») deviendra la devise du Brésil, inscrite sur son drapeau. Ne faut-il pas voir dans sa vision une préfiguration du vocable « Occidentaux » dans lequel Européens et Américains sont englobés aujourd’hui ?
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De la Révolution française à l’Empire de Napoléon

Dès la fin du XVIIIe siècle, la grande lueur était venue de l’Ouest, préparée par la philosophie des Lumières et portée au-delà des frontières de la France révolutionnaire par des troupes de patriotes dont le but affiché était de libérer les peuples du despotisme d’Ancien Régime. Ces « missionnaires armés », selon une expression souvent utilisée à leur propos, ont ainsi semé à travers l’Europe les « principes de 1789 », dont le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes enflamma un peu partout des désirs de rébellion. Et l’aventure napoléonienne contribua, à son corps défendant, à cette même diffusion.
« Cet air de liberté au-delà des frontières / Aux peuples étrangers qui donnaient le vertige » (Jean Ferrat) ne fut pas mal accueilli en Allemagne. Kant y vit l’amorce d’une humanité enfin prête à se soumettre au règne de la loi. De la bataille de Valmy le 20 septembre 1792, Goethe dira que « de ce lieu et de ce jour date une nouvelle époque dans l’histoire du monde ». Le philosophe Herder et le poète Schiller adhérèrent dans un premier temps à cette promesse d’ouverture sur des lendemains radieux, au point que le second, immortel auteur des Brigands, reçut de la Convention le titre de citoyen français.
Mais cet état de grâce fut de courte durée. Le cours pris par la Révolution française, Terreur comprise, contribua au rejet de la dimension universaliste du message révolutionnaire du début.
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Prémices d’une conscience européenne aux XVIe et XVIIe siècles

Au XVIe siècle, l’Europe est entrée dans une zone de fortes turbulences. La prise de Constantinople en 1453, la chute de Grenade marquant la fin de la Reconquista en 1492 et, la même année, la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb ont bousculé une chrétienté dans laquelle elle avait vécu, bon an mal an, tout au long du Moyen Âge, au point de se confondre avec elle. La Réforme, née en Allemagne, ne fera qu’impacter davantage les mentalités de l’époque, suscitant elle-même de profondes et durables cassures dans les sociétés européennes.
L’avancée victorieuse de la puissance ottomane sur le continent a surtout marqué les esprits du temps. On a vu que le projet de croisade contre les Turcs qu’avait lancé le pape Pie II, alias Piccolomini, avait fait long feu. Ainsi, le danger turc, surgi sur l’aire sud-orientale de l’Europe et en passe de s’étendre sur ses contrées centrales, voire occidentales, n’avait pas suffi à fédérer les volontés de résistance militaire des royaumes chrétiens et autres républiques ou principautés. Pire, on avait même vu François Ier, roi de France, s’allier avec le sultan contre Charles Quint, incarnation impériale des Habsbourg. Ce n’est qu’à la suite de la bataille navale de Lépante, le 7 octobre 1571, menée par Don Juan d’Autriche, que les Turcs se verront contraints de rester sur la défensive, sur mer en tout cas.
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La Respublica christiana du Moyen Âge

Après la cassure Est-Ouest et Nord-Sud, consécutive à la disparition de l’Empire romain d’Occident en 476 et à la conquête arabe du VIIe siècle, le mot « Europe », dépourvu de tout contenu politique aux yeux des Anciens, a sensiblement servi à désigner l’aire géographique occidentale du Vieux Continent. Mais, l’expansion du christianisme aidant, le concept qu’il véhiculait cahin-caha s’est bientôt chargé d’une signification inconnue dans l’Antiquité païenne. Autrement dit, la Respublica romana de l’Antiquité s’est petit à petit muée en Respublica christianade l’âge médiéval.
La mutation du monde païen en monde chrétien, car c’est bien de cela qu’il s’agit, ne s’est pas opérée du jour au lendemain, comme on s’en doute. « Il a fallu de nombreux siècles pour que s’impose le terme de “chrétienté” (christianitas), appliqué à une région. » Elle se fit, grosso modo, du Ve au XIe siècle. Durant le Haut Moyen Âge, par exemple, dans un manuscrit d’Isidore de Séville figurant l’orbis christianus, la Terre, entourée d’un cercle, est divisée en trois parties : Asia, Europa, Africa ; à chacun de ces trois continents sont respectivement attribués les noms de Sem (pour l’Asie), de Japhet (pour l’Europe) et de Cham (pour l’Afrique), tous trois fils de Noé selon la Bible. Un plus grand cercle, englobant le premier, figure l’Océan. Mais le mot « Europe » ne désigne chez l’évêque auteur de cette représentation qu’une réalité géographique, confirmée du reste dans son Traité de la nature (v. 620).
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