L’humanité est viscéralement idolâtre, elle a besoin de modèle. Elle ne sait pas vivre sans admirer, sans prier, sans espérer. Puisque de Dieux, il n’y a plus, elle les a remplacés par d’autres. Ce sont des symboles de réussite. Ils sont beaux, ils sont riches, ils sont heureux. L’humanité a érigé de nouvelles idoles, en les choisissant dans son sein.
Les sorciers sont comme le personnage antique de Charon à bord de sa barque, ce passeur d’âmes traversant l’Achéron de la rive du monde des vivants à celle du monde des morts…
…Les sorciers veillent à l’équilibre du Bien et du Mal entre les deux rives. Le premier et le deuxième monde sont de même nature, leur matière commune les composant est humaine.
Mais que voulez-vous, Darius est comme ça : déterminé, dur au mal, peu scrupuleux si besoin, et animé par une foi sans failles en son destin personnel, forcément un peu plus grand que celui des autres. Dans certaines circonstances, mieux vaut ne pas se retrouver en travers de son chemin.
D’une certaine façon, cette réouverture de l’instruction quelques mois plus tard est une formidable occasion de replacer l’église de la Justice au milieu du village. Elle compte bien démontrer comment une justice, faisant un sage usage du temps et de l’espace, à la lumière de faits démontrés et étayés et pas sur des rumeurs ou des émotions passagères, se hisse à la hauteur du symbole qui la représente, une balance rationnelle, éclairée et équilibrée
Dans ce monde ravagé par les excès d’un libéralisme sans garde-barrière, inexorablement, les démocraties s’affaiblissaient au profit de quelques gigantesques conglomérats privés, refoulant peu à peu ces grands états démocratiques, leur gouvernement et leur administration au rang de simple gratte-papier, tamponnant des autorisations à la distribution et à la vente de tel ou tel produit.
Les soldats invincibles d’Alexandre le Grand, les légions puissantes de Rome, les divisions des armées impériales chinoises, les glorieuses troupes de cavaliers mongols, tous se sont cassés les dents sur les rochers afghans. Notre homme connaît son Histoire sur le bout des doigts. Elle se répète obstinément car l’humanité oublie autant qu’elle s’oublie sur son parcours existentiel.
Malheureusement, il arrive que des choses totalement improbables surgissent, comme un nouveau virus, création de Mère Nature et petit cadeau empoisonné à destination du plus turbulent de ses enfants. La crise sanitaire du coronavirus est inédite, spectaculaire, et mortelle. Elle a requis des moyens et des décisions extraordinaires : restrictions de circulation hors puis à l’intérieur du territoire, fermeture de tous les lieux publics, confinement pendant plusieurs semaines de toute la population, décret d’état d’urgence. Les autorités gouvernementales ont endossé l’habit régalien et pris des dispositions habituellement réservées aux situations de conflit ouvert entre nations. Cette « guerre » a été menée avec des médecins et des infirmières, avec des pompiers et des services d’urgence, et bien évidemment avec des policiers. Quand la catastrophe sanitaire a cogné à la porte de la maison France, les trous dans les blouses et les bottes sont apparus au grand jour, l’absence de stocks pour les consommables s’est fait remarquer, le manque structurel de lits et de matériels a sauté aux yeux. Les Français malades ont découvert leurs hôpitaux aussi malades qu’eux. La situation n’est pas meilleure dans leurs écoles ou dans leurs commissariats.
Comme tous ses compatriotes, il s’est conformé de mauvaise grâce aux règles de confinement et a passé le plus clair de son temps dans son appartement de l’avenue de Clichy avec son colocataire et le chat, ne sortant que pour l’approvisionnement essentiel, ce qui n’a pas bouleversé outre mesure ses habitudes. Simon était déjà un solitaire à la vie sociale quasi inexistante avant les exigences sanitaires. Simon a le confinement naturel.
Sa lecture l'a sainement occupé, entre sa pause déjeuner passée à dévorer une boîte de raviolis encore froide, et sa pause du dîner ornée au bocal de cassoulet avec beaucoup de fayots et peu de saucisses, qui n'avait de tradition que son étiquette. […] Depuis le creux de sa vague, Simon est sobre et ingurgite des boîtes de fabrications industrielles aux étiquettes marketées avec soin, pour mieux tromper le consommateur candide.
Alice n’a pas encore trente ans et elle commence à comprendre ce qui abîme vraiment les flics comme Simon Lanterne, son ancien patron à la PJ. Ce qui use dans la durée, ce n’est pas un Jacques Mesrine ou des frangins Kouachi, c’est Monsieur Martin qui dézingue sa Denise au couteau de cuisine, un samedi soir sur la Terre devant une émission de variétés, plus par désœuvrement qu’autre chose.