A cette époque dramatique, le major-général Georges Vanier, ambassadeur et futur gouverneur général du Canada – citoyen d’honneur de la ville de Honfleur, berceau de ses ancêtres , parlant aux Français par la voie de Radio-Alger, prononçait cette phrase que les Normands entendirent avec une profonde émotion :
Après la nuit, la lumière se fait enfin sur la France. Les premiers rayons dorent la terre de Normandie d’où, il y a trois siècles, mon ancêtre Guillaume Vanier s’embarquait pour le Canada. Vous comprenez maintenant à quel point je partage votre joie. Au Canada, on chante encore « Je veux revoir ma Normandie ». C’est un rêve réalisé pour beaucoup de Canadiens qui luttent en ce moment près de Caen. »
Près de 5 000 Canadiens avaient débarqué le 6 juin sur la Côte de Nacre, dont bon nombre en chantant - nous l’avons rappelé – l’hymne composé par Frédéric Bérat, mais, hélas ? ! le général Vanier prononça les paroles que nous évoquons, combien de centaines d’entre eux avaient déjà répandu leur sang généreux comme une eau lustrale destinée à purifier le sol normand de la souillure hitlérienne ? Et des milliers de leurs camarades allaient encore jalonner de leurs corps meurtris le long chemin qui devait les conduire des rives de l’Orne aux rives de la Bresle : la « Voie sacrée » de la délivrance…
Le normand ne s'incline pas facilement devant la force brutale. Il s'oppose par nature aux lois qu'on veut lui imposer lorsqu'elles portent atteinte à ses libertés. Il devient inflexible lorsqu'elles lèsent ses intérêts; aussi, dés le début de l'occupation ennemie, des signes de rébellion commencèrent-ils à se manifester dans les villes et dans les campagnes de sa province.
Le vieil adage: "En Normandie, chacun est sire de sé" hante les esprits. Il signifie "chacun est son propre souverain" et maître chez lui. Les gens du pays qui, au Xe siècle, a su conquérir ses propres conquérants ne purent admettre que des étrangers vinssent les commander et appliquer leurs lois !
Farouchement accrochés à leur sol ancestral, les Normands en étaient venus à le considérer comme inviolable....