Jacques Laborde

Parmi toutes les histoires et légendes qui constituent l'extraordinaire aventure du Voyage des Plantes en voici une qui témoigne du sens de la mission d'honneur d'un officier de Marine qui, par sa détermination contribuera à faire naître la culture du café dans les Antilles. C'est en accomplissant un geste héroïque, que l'enseigne de vaisseau Gabriel Mathieu d'Erchigny de Clieu, sauva d'une mort certaine, deux pieds vivants de caféiers embarqués sur le navire le Dromadaire. Lorsqu'il vit en pleine tempête, qu'un membre d'équipage mal intentionné, tentait de jeter par dessus les plants de caféiers, il s'interposa aussitôt en demandant à l'individu de lâcher ces arbustes. Surpris dans son forfait, l'homme n'insista pas, mais parvint malgré tout à casser une branche. S'interrogeant sur le sens et la portée de ce geste, qui aurait pu compromettre à jamais l'introduction de cet arbuste en Martinique, Gabriel de Clieu finira par apprendre que le marin était hollandais et qu'il avait agi ainsi pour défendre les intérêts économiques de son pays qui détenait le monopole de l'approvisionnement du café partout en Europe.

C'est à André Thouin, professeur de culture au Jardin du Roy et membre de l'Académie des Sciences, que l'on doit la formation de ces nombreux jardiniers-voyageurs qui accompagnèrent les expéditions maritimes de découvertes ou qui furent envoyés par lui dans nos colonies : Collignon jardinier de l'expédition de Lapérouse, Delahaye du voyage d'Entrecasteaux, Guichenot, Riedlé et Sautier de l'expédition Baudin, Martin collecteur de plantes à Maurice, Perrottet à Pondichéry et jardinier-botaniste de l'expédition Philibert. La liste est longue et on ne saurait donner ici, les noms de tous les jardiniers botanistes ayant accompli une mission, imaginée et voulue par cet homme, reconnu de son vivant comme le principal concepteur, pourvoyeur et animateur du premier jardin botanique d'Europe.

Le point commun à tous les jardiniers-voyageurs d’André Thouin était qu’ils étaient tous dotés d’une grande ouverture d’esprit. Ils faisaient preuve de curiosité, d’intelligence et d’une grande tolérance. Manifestant de l’intérêt et de la compréhension pour tout ce qui ne relevait pas de leur compétence immédiate, ils ne craignaient pas d’accomplir d’autres tâches, à la demande de leur chef.

Le platane originaire d'Amérique du Nord, introduit en Angleterre par le jardinier du Roi, John Tradescant (1570-1638) et hybridé vers 1650 avec un platane d'Asie pour devenir le platane commun, se répandit partout en Europe y compris chez nous au bord de nos grands axes routiers.

C'est en découvrant Hispaniola (très vite appelée St Dominique), la Guadeloupe et la côte sud-ouest de Cuba que Christophe Colomb (1451-1506) introduisit dans ces îles - lors de son second voyage de 1493 - des plants de canne à sucre, prélevés aux Canaries, mais originaires d'Asie ou de Nouvelle Guinée comme il est supposé dans les Atlas de botanique.

Tout heureux de remplir sa tâche, il [Francis Masson] en perdit parfois le sens du temps et de l’éloignement, au point qu’il se retrouva souvent seul, perdu le soir dans les montagnes escarpées, au beau milieu de serpents venimeux et de hyènes déchaînées.