Pour bien juger un tableau du genre historique, pour envisager convenablement l'image d'in trait de bonté, de grandeur, d'héroïsme, le sentiment est le guide le plus sûr; mais il ne suffit point : que de connaissances ne faut-il pas réunir avant de se rendre un compte exact de ses sensations, et de pouvoir motiver judicieusement une opinion qui embrasse à la fois le choix du sujet, l'art dans lequel il a été conçu, et le degré de mérite du talent qui à présidé à son exécution jusque dans les moindres détails ?
Ce style idéal, dans lequel le Poussin a eu des imitateurs et jamais de modèle, il ne l'a fait consister ni à composer des paysages suivant les pcaprices de son imagination, ni à choisir de beaux sites, et à les imiter fidèlement pour les enrichir ensuite des sujets d'invention ou puisés dans les annales de l'histoire ou des temps héroïques; mais, à l'usage qu'il en fait, et d'après les résultats qu'il a obtenu, on peu juger qu'il s'est arrêté primitivement à cette idée, qu'en se pénétrant bien de tout ce que la nature offre de plus parfait et de plus majestueux dans ses aspects, ses réminiscences et ses études viendroient nécessairement au secours de son imagination, et que dès lors, sans s'écarter de la vérité, il lui serait facile d'établir une parfaite relation entre le lieu de la scène et les personnages qu'il y mettrait en action.
Une entreprise de cette importance présentait de grandes difficultés à vaincre : pour les aplanir, il n'était qu'un seul moyen dont les résultats fussent infaillibles. Cimabué qui sut l'entrevoir ne balança point à y recourir ; il s'attacha à l'imitation de la nature. Ses tentatives que le succès devait en partie couronner furent puissamment secondées par Giotto qui, de simple berger devenu son disciple et bientôt après son émule, mérita de partager sa gloire, sinon comme premier inventeur, du moins en se formant de manière plus vraie et plus agréable que celle que son maître lui avait enseignée, ou que la vue de ses ouvrages avait dù lui faire primitivement adopter.
Ce n'est pas que tous les artistes qui se destinent au genre du paysage aient la même organisation, et dès lors, qu'ils soient indistinctement capables de ne s'attacher, dans l'imitation des oeuvres pittoresques de la nature, qu'à ce qu'elle produit de plus parfait en ce genre. Leur détermination, à cet égard, se règle sur la disposition plus ou moins heureuses qu'ils ont apportées en naissant, et selon le degré du perfectionnement de leurs facultés, d'après l'étude et la méditation : ainsi, ils observeront tous la nature attentivement, et ils s'éfforceront de l'imiter dans ses effets les plus remarquables...
Nul doute cependant que quelques uns des peintres d'histoire, qui ont paru dans les cours des quatorzième et quinzième siécles, n'aient traité dans leurs compositions le paysage comme accessoire d'un sujet principal, ou qu'ils ne l'aient fait servir de fond à leurs tableaux.