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Citation de Ledraveur


Henri-Charles Puech (Satan : Études carmélitaines) a parfaitement résumé l'essentiel du message manichéen dont on ne soulignera jamais assez la survivance jusqu'à nos jours dans l'Occident chrétien. Le Prince des ténèbres est la traduction mythique d'une même réalité, à la fois physique et psychologique, qui s'exprime sur le plan physique sous les espèces de la Matière et sur le plan psychologique sous celles du Désir. Matière ou Désir, le fond de cette réalité est un mouvement désordonné et furieux, ici et là éprouvé comme un mal et conçu comme constituant le Mal en soi. Mal parce qu'il est infini et irrationnel, sans commencement ni achèvement, sans cause ni but, sans raison aucune. Mal parce qu'il est, du même coup, « stupide », contingence nue, l'essence de tout ce qui — pur chaos ou instinct brut —, absurdement et perpétuellement, apparaît, disparaît, reparaît dans l'instant. Hypostase ou fils de la Matière et du Désir, le Satan du manichéisme incarne, en dernière analyse, la condition charnelle de l'homme réduite à soi seule, l'existence dans le temps saisie sous son jour le plus dépouillé, la « vie » insensée, illusoire et contradictoire, à laquelle la créature, si elle est privée de tout recours à la paix de l'Esprit, aux lumières salvatrices de la révélation et de l'Intelligence, est, aux yeux de la secte, présentement et ici-bas, condamnée, et qui, abandonnée à soi, n'est que perte, destruction, péché, enfer, mort — une nuit désespérée.
p. 280
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