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Citation de LiliGalipette


aillette d’or est un disque minuscule en métal doré, percé d’un trou. Mince et légère, elle peut flotter sur l’eau. Il en reste quelquefois une ou deux accrochées dans les boucles d’un acrobate.

Cet amour – mais presque désespéré, mais chargé de tendresse – que tu dois montrer à ton fil, il aura autant de force qu’en montre le fil de fer pour te porter. Je connais les objets, leur malignité, leur cruauté, leur gratitude aussi. Le fil était mort – ou si tu veux muet, aveugle – te voici : il va vivre et parler.

Tu l’aimeras, et d’un amour presque charnel. Chaque matin, avant de commencer ton entraînement, quand il est tendu et qu’il vibre, va lui donner un baiser. Demande-lui de te supporter, et qu’il t’accorde l’élégance et la nervosité du jarret. À la fin de la séance, salue-le, remercie-le. Alors qu’il est encore enroulé, la nuit, dans sa boîte, va le voir, caresse-le. Et pose, gentiment, ta joue contre la sienne.

Certains dompteurs utilisent la violence. Tu peux essayer de dompter ton fil. Méfie-toi. Le fil de fer, comme la panthère et comme, dit-on, le peuple, aime le sang. Apprivoise-le plutôt.

Un forgeron – seul un forgeron à la moustache grise, aux larges épaules peut oser de pareilles délicatesses – saluait ainsi chaque matin son aimée, son enclume :
- Alors, ma belle !
Le soir, la journée finie, sa grosse patte la caressait. L’enclume n’y était pas insensible, dont le forgeron connaissait l’émoi.

Ton fil de fer charge-le de la plus belle expression non de toi mais de lui. Tes bonds, tes sauts, tes danses – en argot d’acrobate tes : flic-fac, courbette, sauts périlleux, roues, etc., tu les réussiras non pour que tu brilles, mais afin qu’un fil d’acier qui était mort et sans voix enfin chante. Comme il t’en saura gré tu es parfait dans tes attitudes non pour ta gloire mais la sienne.
Que le public émerveillé applaudisse :
- Quel fil étonnant ! Comme il soutient son danseur et comme il l’aime !
À son tour le fil fera de toi le plus merveilleux danseur.

Le sol te fera trébucher.

Qui donc avant toi avait compris quelle nostalgie demeure enfermée dans l’âme d’un fil d’acier de sept millimètres ? Et que lui-même se savait appelé à faire rebondir de deux tours en l’air, avec fouettés, un danseur ? Sauf toi personne. Connais donc sa joie et sa gratitude.

Je ne serais pas surpris, quand tu marches par terre que tu tombes et te fasses une entorse. Le fil te portera mieux, plus sûrement qu’une route.
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