Si les monstres ont disparu, le monstrueux prolifère (...). Condamnés à un éternel retour, les monstruosités virtuelles de l'écran n'inquiètent que pour mieux rassurer, sans jamais parvenir à dissiper une impression persistante de déjà vu.
Ce n'est pas le dernier de leurs paradoxes. Délivrées de leur encombrement charnel, disposées à une distance optimale, les mutations tératologiques des salles obscures offrent une surface de projection d'une plasticité inédite : les simulacres monstrueux rassurent, mais aussi émeuvent. (...) L'identification du spectateur est devenue plus aisée, l 'empathie plus grande avec la représentation de la souffrance exprimée par un automate simiesque qu'à celle confinée dans la monstruosité d'un corps humain. (...) L'illusion cinématographique vint à point nommé soulager les regards du poids devenu indésirable de la difformité humaine, en instaurant le principe de l'arbitraire du signe dans l'univers de la compassion.