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Citation de enkidu_


Tout silence qui reste inscrit dans la banalité, dans la métaphysique, et même dans l’Être/étant, voire dans une théologie oublieuse des noms divins, n’offre que des idoles muettes. Il ne suffit pas de se taire pour échapper à l’idolâtrie, puisque, par excellence, l’idole a en propre de se taire ; et donc, de laisser les hommes se taire quand ils n’ont plus rien à dire – pas même des blasphèmes. Le silence, qui convient au Dieu qui se révèle comma agapè dans le Christ, consiste à se taire par et pour l’agapè : concevoir que si Dieu donne, dire Dieu impose de recevoir le don, et – puisque le don n’advient que dans la distance – à le rendre. Rendre le don, jouer en redondance la donation impensable, cela ne se dit pas, mais se fait. Alors seulement peut renaître le discours, mais comme une jouissance, une jubilation, une louange.

Plus modestement, le silence qui convient à Dieu impose de savoir s’en taire, non par agnosticisme (le surnom poli de l’athéisme impossible), ni par humiliation, mais simplement par respect. Même contre soi, il faut reconnaître que, si nous n’aimons pas assez l’agapè pour la louer, nous devons au moins préserver cette impuissance comme la trace d’un possible. Et garder notre silence comme un trésor, encore pris dans la gangue qui en offusque la splendeur, mais n’en protège pas moins le futur éclat. Ce silence-là, et nul autre, sait où il se trouve, qui il tait, et pourquoi il doit, un temps encore, préserver une décence muette – pour se libérer de l’idolâtrie.

Si nous parvenions à entrevoir ne fût-ce que l’esquisse de ce par où l’agapè excède tout (et l’Être/étant), alors notre silence pourrait nous faire devenir, un peu, des « envoyés… annonciateurs du silence divin »(1).

(1) Denys, Noms Divins, IV, 2, P.G., 3, 696 b. (pp. 154-155)
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