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Citation de Nadael


« Cette fois, le dernier virage s'ouvre sur le paysage lunaire de la cité aux murs noircis, une sorte de porte-avions en béton, coincé de chaque côté par deux terrains vagues et échoué, à l'arrière, contre la terre grasse d'un champ labouré qui s'étend à l'horizon. La crasse mise à nue par les rayons du soleil se décline le long des murs en traînées verticales et en larges bandes horizontales semblables à des traces de freinage sur le bitume. Des draps et du vieux linge usé pendent des fenêtres ouvertes et sèchent au gré du vent. Des vélos d'enfants, des récipients en plastique, des balais encombrent quelques étroits balcons emprisonnés par de solides barreaux métalliques. Les centaines de paraboles ajoutent à cette impression de navire militaire abandonné. S'élevant sur une bonne quarantaine d'étages, les quatre tours reliées par une dalle centrale en béton paraissent vouloir s'enfoncer dans le sol. Leur densité inquiète ajoute à l'air lourd un pesant sentiment de dérive, de catastrophe en devenir, d'instabilité permanente. C'est bien là un porte-avions en béton, délaissé, pris en otage par la misère et son cortège de vices, abandonné dans un cimetière de destins entouré de néant. Ce porte-avions ne porte rien et n'est porté par rien. Car d'ici plus rien ne s'envole, plus rien n'est aérien, plus rien ne cherche à accrocher le firmament. Ici aucune vague d'espoir, que du vague-à-l'âme, aucune mer d'où partir à la conquête de nouveaux territoires, à la découverte d'une île utopique. Tout s'effondre, suinte vers le bas comme une sève purulente. Ici le mal de vivre ne se devine pas : il se lit à livre ouvert sur cette matière sans espoir qu'on nomme béton (…). »
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