Je n'étais pas rentré à Fenyang depuis un an et demi déjà. Il m'a semblé que tout avait beaucoup changé. (...). Il y avait parmi ces habitants certains de mes vieux amis avec lesquels je m'entendais très bien. Nous avions grandi ensemble, mais lorsqu'ils ont eu dix-huit ans, leur vie s'était comme interrompue. Ils n'avaient plus la moindre aspiration. Ils ont été pris dans une unité de travail, embauchés à l'usine, puis ont suivi le cours de la vie quotidienne. J'ai été profondément troublé par cet accablement, cette altération qui vide les relations humaines de tout romanesque.
On pensait à l'époque que les douleurs faisaient partie du passé, que l'aujourd'hui était agréable. Qui cependant se rend compte qu'au moment où nous sommes censés "goûter la douceur", nous vivons en réalité une catastrophe ? Rien ne laisse penser que la jeune génération soit plus heureuse que la précédente. Comme chacun sait, le bonheur n'augmente pas avec les biens matériels.