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Critiques de Jocelyn Benoist (7)
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L'itinéraire de Tran Duc Thao : Phénoménologie et..

Je découvre avec plaisir dans ce livre la réédition de "Phénoménologie et matérialisme dialectique", de Tran Duc Thao, un ouvrage que je recommande à tous ceux qui veulent connaître la phénoménologie mais ne se sentent pas de lire Husserl dans le texte et une certaine forme de marxisme qui se rattacherait plutôt aux textes d'Engels qu'à ceux de Marx. Ardu, mais accessible ...
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Nouvelle philosophie en Allemagne et en Fra..

Il arrive fréquemment que les ouvrages collectifs soient hétérogènes en ce qui concerne la qualité des différents textes qui les composent. Ce n'est pas le cas de celui-ci : la qualité s'y retrouve presque partout.



Il n'est certes pas possible de rendre compte des nombreuses positions diverses qui le composent en une publication étant donné le nombre de contributeurs (Français ou Allemands pour la plupart). Mais il est possible d'y retrouver l'idée phare qui caractérise le phénomène métaphysique de l'Europe actuelle et que cet ouvrage parvient tout à fait à rendre en compte : le développement d'un réalisme qui reprend à son compte certains traits idéalistes concomitant au développement d'un idéalisme ayant déjà quelques attraits pour le réalisme. Les contributeurs ne sont pas nécessairement d'accord sur le principe d'une réconciliation entre le réalisme et l'idéalisme mais le fait est que l'opposition théorique s'est considérablement complexifiée.



A vrai dire, cette conception n'est pas nouvelle en droit. Déjà, l'idéalisme absolu de Hegel a quelque chose de proprement réaliste, puisqu'il s'agit ni plus ni moins que d'affirmer la réalité du Concept - et l'on n'est pas ici dans le résidu kantien du réalisme, laissant la chose en soi hors de portée, mais bien dans un réalisme spéculatif, pour reprendre une expression contemporaine et critique d'un corrélationnisme que Hegel voulait déjà dépasser. Mais une telle conception ne pouvait sans doute pas assumer la dé-subjectivation que réclame à la fois le réalisme ancien et le réalisme nouveau.



Un dilemme se présente déjà en mon sens. Si l'idéalisme doit mener à une forme de réalisme, alors, sans nécessairement être platonicien, il doit renoncer au subjectivisme, et ainsi renoncer à lui-même. Si le réalisme doit mener à une forme d'idéalisme, alors, sans nécessairement être platonicien, il doit renoncer à l'idée du Monde, et, sans pour autant devenir perspectiviste, doit en revenir à une espèce de suspension.



Prenons Markus Gabriel, qui est sans doute l'un des philosophes majeurs de l'Allemagne d'aujourd'hui, figure du nouveau réalisme. Sa conception ne consiste pas à affirmer l'existence indépendante d'un monde extérieur omnienglobant, et consiste encore moins en un réalisme naïf au sens technique que l'on doit donner à ce terme. Pour Gabriel, le monde, à proprement parler, n'existe pas. Les objets existent. Comprenons bien son argumentaire : l'existence ne saurait être une propriété propre (à moins d'admettre que le jugement "la licorne n'existe pas" suppose au préalable l'existence de la licorne), et est donc une propriété logique ou métaphysique. Il faut également considérer l'existence comme la propriété des champs de sens que quelque chose apparaisse en eux. Si l'on fait d'un champ de sens unique un champ omnienglobant, on impose à l'existence d'être une propriété propre, puisque l'on impose aux divers champs de sens une propriété générale de leur apparaitre, c'est-à-dire que l'on fait de l'existence (propriété d'un champ de sens que quelque chose y apparaisse) une caractéristique propre. Le nouveau réalisme n'est ainsi pas un idéalisme (même s'il autorise des antiréalismes locaux), mais on aura du mal à saisir le lien direct avec l'ancien réalisme. Ne devrait on pas, en effet, considérer que l'inexistence du monde et la conception même de champ de sens impliquent, sans tomber dans le perspectivisme, une doctrine de la constitution, et par là revenir à une certaine phénoménologie ? Pourtant, il semble bien que le primat n'est pas ici donné au sujet constituant. Mais alors, comment un champ de sens pourrait s'imposer comme champ de sens, et l'existence s'impliquer comme propriété métaphysique ? C'est d'ailleurs justement dans cet ouvrage que l'on trouvera une défense d'une herméneutique réaliste (Koch).



Face à toutes ces perspectives, il semblera peut-être que l'opposition entre l'idéalisme et le réalisme n'a pas ou plus de sens. Mais la réplique me semble devoir être donnée : car la dissolution d'une telle opposition, cela serait déjà la dissolution de l'opposition entre la thèse d'une autonomie objective (qui peut d'ailleurs se prendre après constitution conceptuelle) et la thèse d'une constitution subjective ou, plutôt, métasubjective, c'est-à-dire la dissolution de la possibilité théorique d'un monde détaché de l'intelligible, c'est-à-dire déjà la victoire d'un certain idéalisme objectif et ontologique compris en un sens spécifique.
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Concepts : Une introduction à la philosophie

Un livre plutôt technique, pas démesurément difficile à lire non plus. J'ai été un peu abusé par le sous-titre et croyais y trouver une véritable introduction à la philosophie, alors qu'il s'agit davantage d'une introduction à l'analyse des concepts dans une perspective "contextualiste", inspirée notamment du logicisme et de la philosophie analytique.



Ceci étant, c'était une première pour moi et je dois avouer que cela me donne envie d'approfondir, notamment pour Frege, Austin et Wittgenstein qui sont mobilisés à plusieurs reprises. Le style de l'auteur est rigoureux et démonstratif, ce qui est plutôt agréable à suivre.
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Les limites de l'intentionalité

Innombrables questions directes, sollicitation permanente du lecteur, phrases courtes et hachées, paragraphes sans lien entre eux, titres comme des prises de paroles, chapitres écrits d'une haleine comme on parle, références en foule à toutes sortes d'auteurs pour gonfler les formules, allers-retours vers des auteurs pour en présenter d'autres.... impossible à lire et d'extraire la pensée de l'auteur...
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Logique du phénomène

Un ouvrage qui, à plus d'un titre, éclaire le lecteur sur la nature de la phénoménologie et de ses problèmes. Sans polémique stérile, l'auteur remet en cause, de manière légitime, l'emploi inconditionné du concept de phénomène dans la philosophie moderne et contemporaine : non que le phénomène ne trouve pas sa place dans la philosophie de monsieur Benoist, mais qu'il suppose une norme, un préalable ontologique, à partir duquel le remplissement de l'intention phénoménologique serait envisagé, à partir duquel le « donné » serait rendu envisageable, grammaticalement possible (si toutefois il s'agit véritablement d'une question de « grammaire », comme le considère Benoist, en lieu et place d'une « simple » impasse conceptuelle).



L'axe argumentatif de l'essai se présente dès le premier chapitre. L'argumentaire peut se résumer ainsi :

• Pour que la notion d'apparaître ait un sens il faut une rupture, une surprise : il faut donc une norme d'attente et des conditions qui viendraient instituer le caractère phénoménal et qui ne se confondraient pas avec l'apparaître lui-même

• On ne peut faire de l'exception le principe du normal, au moins sur le plan conceptuel. La non-perception se définit ainsi par la perception. Ainsi la perception, qui constitue alors la normale, n'est pas apparaître.

• Il n'y a donc pas d'apparaître inconditionné en fonction de la « syntaxe ordinaire ». Il y a une norme ontologique à l'apparaître : cette norme s'institue par l'être (Benoist refusera cependant d'hypostasier cette norme).

Ce raisonnement est rigoureux et tout à fait valide. On lui trouvera même une profonde vérité. On pourrait cependant remettre en cause, avec quelque hardiesse, la prémisse selon laquelle le phénomène serait rupture : si l'on considère l'apparaître, et même si on ne saurait appeler apparaître l'être, on doit admettre la possibilité que la norme n'est pas celle que l'on croyait, et que ce qui était tenu pour constance constitue à partir de ce moment-là le véritable phénomène ; on peut aussi considérer que, eu égard à l'être en tant qu'être, l'on a surtout affaire à des possibilités essentielles, et que toute manifestation, y compris une constante, représente, de fait, une rupture du champ apriorique des possibles. Cela manquerait certainement de « naturel » à une lecture imparfaite, mais c'est précisément ainsi qu'opère notre esprit lorsqu'il apprend à objectiver dans son développement.



Si la sophistique revient au refus des normes et à une critique radicale du langage, c'est parce l'être lui-même est coulé dans la grammaire de l'apparaître – ce que, précisément, il ne serait pas en tant qu'instituteur de la norme. Faire du phénomène un absolu, l'unique source d'accès, ce qu'a d'ailleurs aussi fait le positivisme de Comte, serait donc une erreur logique : c'est selon moi tout à fait vrai dans la mesure où il n'y a pas de sens à viser un objet sans objet, et c'est pourquoi il n'est pas question de se contenter de la seule phénoménologie pour obtenir un discours sur le monde en l'absence d'une objectivité préalable, le phénomène n'étant pas de lui-même un fait. Reste selon moi à comprendre que cet être n'est pas un existant, car une norme ne saurait s'instituer si l'on ne pose pas le fait de présence, attesté par la visée même, à partir d'une application effective de la norme, laquelle suggère, pour être appliquée, un substrat sur lequel s'appliquer : l'être ne peut normer quoi que ce soit s'il n'a pas de substrat, et ne peut donc se présenter lui-même comme normateur effectif, et dans ce contexte « réel », sans système d'apparition. Il est visé en étant, pour ainsi dire, déjà posé, mais il faut bien admettre qu'il l'est en tant que possible, et que le possible (d'ailleurs intellectuel par principe) ne se réalise qu'au contact de l'acte d'apparaître. Si la norme procède de l'être et non du paraître, on peut fort bien considérer que l'être, qui n'est pas le réel, s'atteste à travers son paraître, et que la norme gagne ainsi son véritable efficace. On doit même considérer qu'une norme ontologique du paraître extérieure au paraître est déjà posée dans la perspective de la vérification d'un paraître : ainsi, si le « don » se constitue bien en fonction d'une possibilité antérieure, alors il en reste pas moins que cette norme ne s'active qu'en fonction du phénomène. Cette norme se retrouverait alors dans la subjectivité transcendantale, absolue, ce que rejette précisément Benoist. On objectera que cette norme provient alors bien d'un être réel et indépendant : il l'est sans doute dans toute sa « naturalité », mais son existence dépend d'une possibilité absolue d'adéquation entre lui et son apparaître : cette possibilité qui ne dérive pas encore d'une décision extérieure à l'objet implique pourtant ensuite la nécessité d'un sujet possible ou transcendantal en matière d'existence. In fine, il est activé par un acte s'appliquant au phénomène. Ainsi, Benoist a tout à fait raison de critiquer l'emploi inconditionné du concept de phénomène, mais je crois néanmoins que la normation suppose une métaphysique idéaliste.



Avec Husserl, la phénoménologie internalise la normativité dans l'espace alors subjectivisé de la phénoménalité : cela constituerait aussi une erreur selon Benoist, sans objet réel pour la normer, sans possibilité, suite à la réduction phénoménologique, d'éviter la régression infinie. Un tel réalisme est solide, mais s'ouvre selon moi à des objections. En commentant Aristote, Benoist rappelle ceci : la douceur du vin n'apparaît qu'en tant qu'elle est douceur du vin, en tant que simple douceur elle est douceur (et il n'y aurait pas de sens à dire qu'elle apparaît comme douceur). Mais c'est déjà là montrer que la caractéristique de l'objet qui apparaît est dans l'espace de la phénoménalité, qu'en vertu de l'attribution de la caractéristique à cet objet l'apparaissant en tant qu'apparaissant est déjà un être. Dans ce cas, l'être continue à avoir un rôle normatif, et ne cesse pas de se distinguer du paraître, mais cette normation s'effectue, sans relativisme, à même le système d'apparition et de constitution. Seulement, cela suffirait à briser l'immanence de la sphère subjective, à faire projeter une transcendance sémantique. Et c'est précisément déjà, il est vrai, un refus du monopole de la phénoménologie.



Je pense qu'il est bon de conclure par la critique de Jean-Luc Marion par monsieur Benoist, plus précisément de la conception du « phénomène saturé » : il n'y aurait pas d'excédant de la signification sur l'intuition, mais impossibilité pour la signification de fonctionner comme norme d'un donné : elle n'est pas au-delà, mais en-deçà, là où on ne peut constituer une possibilité d'être donné. C'est l'intuition qui aurait quelque chose en plus : l'intention ne constitue rien par elle-même. Je crois au contraire que l'intuition peut manquer, que cela n'est en rien agrammatical : on applique l'intention à une intuition, mais rien n'interdit, dans l'acte de normation lui-même (auquel échappe probablement le phénomène saturé, phénomène typiquement esthétique), que le normé prenne une autonomie (ce qui ne serait, sans doute, pas propre au phénomène saturé), parce que l'apparaitre ne se soumet à la norme ontologique qu'en ce qu'y regarde sa manifestation générale, c'est-à-dire qu'elle n'est là qu'initialement. En visant l'objet, même si celui-ci est constitué en tant que préalable, il se peut tout à fait que se manifestent subjectivement du sens supplémentaire : ce sens échappe alors au réquisit de la véracité, mais il reste un contenu. Alors, pour comprendre ce phénomène, il faudra nécessairement en sortir : et là, de retour dans la pleine normalité ontologique, on le comprendra sans le vivre.

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Husserl et Wittgenstein

On ne mettra pas non plus ces deux-là d'accord... Si à la fin du XIXème siècle les idées circulent, sont reprises, leurs utilisateurs ne s'aperçoivent pas immédiatement qu'elles ne signifient pas tout à fait ce qu'ils en attendaient... ou que d'autres y ont mis ce qui ne leur plaît pas. Le recul nous donne la possibilité de comparer les utilisations que font Husserl et Wittgenstein des mots "phénoménologie" ou "logique" par exemple. Seul le premier cherche une théorie de la connaissance... le second joue sur les mots...
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Langage ordinaire et métaphysique : Strawson

Une bon ensemble d'études historiques qui nous permet de bien situer Strawson dans le spectre de la philosophie analytique et de la métaphysique dans les débats du siècle précédant. Les questions principales sont abordées. La lecture de ce livre est donc plutôt instructive.
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