Joy Maguène

Les larmes ressurgissent de plus belle. Elles sont latentes, ces larmes, toujours prêtes à se déverser, n’importe où, n’importe quand. Ce n’est pas facile de les retenir constamment. Elle se laisse aller à son désespoir, à sa vie qui ne sera plus jamais la même, à ce qui a été et ne sera plus. Elle espère chaque fois que ce sont les dernières qu’elle va laisser sortir parce qu’elle est forte, Mathilde. Elle ne veut pas sombrer, elle veut s’en sortir. Et puis, c’est usant de pleurer. Ça rend moche. Les yeux sont gonflés, le nez devient rouge, ça vide de toute son énergie. Si ça pouvait juste se contenter d’évacuer les mauvaises choses, ce serait beaucoup mieux. Mais les larmes ne trient pas. Elles dégoulinent, insolentes, font couler le maquillage, tracent des sillons sur les joues, s’invitent même dans la bouche ou dans les oreilles si on est allongé. Mathilde est encore debout, dos à la porte, son sac de voyage à la main. Elle en veut tellement à son mari. Elle s’en veut tellement. Et puis à tous ceux qui rient, s’amusent, s’enivrent de la vie.